samedi 29 mars 2014

4 e Dimanche du Grand Carême

saint Jean Climaque

Seulement par la prière et le jeûne
Marc 9,14-31
De l'Explication de l'évangile de saint Marc
par le bienheureux Théophylacte, archevêque d'Ochrid et de Bulgarie

14-18. Lorsqu’Il fut arrivé près des disciples, Il vit autour d’eux une grande foule, et des scribes qui discutaient avec eux. Dès que la foule vit Jésus, elle fut surprise, et accourut pour Le saluer. Il leur demanda : Sur quoi discutez-vous avec eux ? Et un homme de la foule Lui répondit : Maître, j'ai amené auprès de Toi mon fils, qui est possédé d'un esprit muet. En quelque lieu qu'il le saisisse, il le jette par terre; l'enfant écume, grince des dents, et devient tout raide. J'ai prié tes disciples de chasser l'esprit, et ils n'ont pas pu.  

Lorsqu’Il fut arrivé près des disciples, c'est-à-dire près des neuf qui n'étaient pas montés sur la montagne avec Lui, Il vit qu'ils étaient en train d'être interrogés par les pharisiens. Car les pharisiens avaient saisi l'occasion de l'absence de Jésus pour tenter de détourner les disciples du Seigneur. La multitude, cependant, L'aperçut soudain et Le salua. Ils avaient désiré de Le voir, et maintenant ils L'aperçurent et Le saluèrent comme s'Il venait juste de rentrer d'un long voyage. Certains disent que même son apparence était devenue plus belle par la lumière de la Transfiguration, ce qui attira la multitude vers Lui pour Le saluer. Un homme dans la foule parla pour répondre à la question du Seigneur. Cet homme était faible de foi, comme même le Seigneur l'atteste lorsqu'Il dit : Race incrédule ! – et encore : Tout est possible à celui qui croit. L'homme lui-même atteste son peu de foi quand il dit : Viens au secours de mon incrédulité ! Ses griefs contre les disciples montrent clairement son incroyance. Car il n'aurait pas dû les accuser devant tout le monde, mais en secret.

19-27. Race incrédule, leur dit Jésus, jusques à quand serai-Je avec vous ? Jusques à quand vous supporterai-Je ? Amenez-le-Moi. On le Lui amena. Et aussitôt que l'enfant vit Jésus, l'esprit l'agita avec violence ; il tomba par terre, et se roulait en écumant. Jésus demanda au père : Combien y a-t-il de temps que cela lui arrive ? Depuis son enfance, répondit-il. Et souvent l'esprit l'a jeté dans le feu et dans l'eau pour le faire périr. Mais, si Tu peux quelque chose, viens à notre secours, aie compassion de nous. Jésus lui dit : Si tu peux ! … Tout est possible à celui qui croit. Aussitôt le père de l'enfant s'écria : Je crois ! Viens au secours de mon incrédulité ! Jésus, voyant accourir la foule, menaça l'esprit impur, et lui dit : Esprit muet et sourd, Je te l'ordonne, sors de cet enfant, et n'y rentre plus. Et il sortit, en poussant des cris, et en l'agitant avec une grande violence. L'enfant devint comme mort, de sorte que plusieurs disaient qu'il était mort. Mais Jésus, l'ayant pris par la main, le fit lever. Et il se tint debout. 

L'homme qui aborda Jésus accusait les disciples de ne pas posséder le pouvoir de guérir. Mais le Seigneur lui retourne le blâme en disant : "C'est ton incrédulité qui est la cause de ce que ton fils n'est pas guéri". Le Seigneur ne S'adresse pas seulement à cet homme, mais à tous, en reprochant à tous les Juifs leur incrédulité. Car il est vraisemblable que nombreux étaient les spectateurs qui étaient scandalisés par l'incapacité des disciples à guérir. Le Seigneur montre qu'Il accueille la mort quand Il dit : Jusques à quand serai-Je avec vous ? – sous-entendu : c'est un supplice pour Moi que de vivre avec vous et votre manque de foi. Mais tout en leur faisant le reproche, Il accorde aussi la guérison. Il ne désire pas guérir le fils pour montrer son Pouvoir, Il procède plutôt avec une grande humilité. Voyez comment Il n'attribue pas la guérison à son propre Pouvoir, mais à la foi de l'homme quand Il dit : Tout est possible à celui qui croit. Dès qu'Il vit une foule commencer à se rassembler tout autour, Il réprimanda l'esprit, ne voulant pas guérir devant la multitude comme pour Se donner en spectacle. Quand Il réprimanda l'esprit et dit : "Sors de lui et n'y rentre plus", cela laisse entendre que, à cause de l'incroyance de l'homme, le démon serait encore rentré en lui, si l'Ordre du Seigneur ne l'avait pas empêché. Le Seigneur permet à l'esprit de déchirer le fils, afin que tous puissent reconnaître l'attaque du démon, et comprendre qu'il aurait tué l'homme s'il n'avait pas été retenu par la Main de Dieu. Un homme est jeté par le démon dans le feu de la colère et du désir, et dans l'eau, autrement dit dans l'écume battante des soucis du monde. Ce démon est muet et sourd à la fois. Il est sourd, ne voulant pas entendre les Paroles de Dieu; et il est muet, n'étant pas capable d'apprendre à d'autres ce qui devrait être enseigné. Mais que Jésus, qui est le Verbe de l'évangile, le prenne par la main, c'est-à-dire, qu'Il fortifie son pouvoir d'agir, alors cet homme sera libéré du démon. Voyez comment Dieu nous aide d'abord, puis nous avons nous-mêmes besoin de travailler. Car l'évangéliste dit que Jésus le fit lever – c'est l'aide divine, et il se tint debout – c'est l'effort de l'homme lui-même de faire le bien.

28-29. Quand Jésus fut entré dans la maison, ses disciples Lui demandèrent en particulier : Pourquoi n'avons-nous pu chasser cet esprit ? Il leur dit : Cette espèce-là ne peut sortir que par la prière et le jeûne. 

Les disciples craignaient d'avoir perdu la Grâce que le Seigneur leur avait donnée, et pensant que c'était pour cela qu'ils n'avaient pas pu chasser le démon. Voyez que par respect, ils abordèrent le Seigneur en privé. Cette sorte – quelle sorte ? La sorte qui fait sa demeure dans les lunatiques, ou, en général, toute la race des démons, ne sort que par la prière et le jeûne. Tous les deux, celui qui souffre et celui qui est sur le point de guérir, doivent jeûner. Les deux sont nécessaires. Le bon sens dicte que celui qui souffre doit jeûner. Il ne doit pas seulement jeûner, mais aussi prier ; et il ne doit pas seulement prier, mais aussi jeûner, car la vraie prière est rendue quand elle est attachée au jeûne. Quand celui qui prie n'est pas alourdi par les effets de la nourriture, sa prière n'est pas chargée et monte facilement. 

30-31. Ils partirent de là, et traversèrent la Galilée. Jésus ne voulait pas qu'on le sût. Car Il enseignait ses disciples, et Il leur dit : Le Fils de l'homme sera livré entre les mains des hommes ; ils Le feront mourir, et, trois jours après qu'Il aura été mis à mort, Il ressuscitera.


Chaque fois que le Seigneur parlait de sa Passion sur la croix, Il faisait précéder et suivre ses paroles par des miracles, de sorte que personne ne puisse penser qu'Il allait souffrir parce qu'Il était faible. Et quand Il disait des paroles de tristesse, comme : "ils Le tueront", Il ajoutait des paroles de joie : qu'Il ressuscitera le troisième jour, nous apprenant que la joie suit toujours la peine et que nous ne devons pas nous angoisser sans nécessité dans nos chagrins, mais espérer des jours meilleurs. 

lundi 24 mars 2014

EN CES JOURS DE CARÊME

Lors du Grand Carême que nous traversons maintenant, l’Église nous impose de longs offices, des jeûnes stricts et d’autres restrictions. On pourrait se demander s'il ne serait pas mieux de laisser à chacun le choix de ce qu’il doit faire pour avancer spirituellement. Cette liberté de choix, voici ce qu’en disait déjà Dostoïevsky : «Au lieu de s’appuyer sur l’ancienne loi rigoureuse, l’homme devait dorénavant décider lui-même d’un cœur libre ce qui était bien et mal en n’ayant pour le guider que ton image. Mais ne songeas-Tu pas qu’il finirait par repousser et contester ton image et ta vérité, écrasé sous ce fardeau terrible : la liberté du choix ?» (Les Frères Karamazov)
   Cette liberté de pouvoir choisir de faire le bien ou de s’en abstenir, c’est cette même liberté qui a fait chuter nos premiers parents dans le paradis. Cette liberté-là aurait dû les amener vers la vraie liberté qui consiste précisément à être uni au bien et à refuser le mal.
   Nos premiers parents étaient sans passions mais aussi sans expérience et nous savons ce qu’ils sont devenus dans leur naïveté. À notre propre inexpérience s’ajoute encore nos passions déréglées qui empêchent toute objectivité. L’Église, par contre, a une connaissance et une expérience millénaire, et vouloir se révolter contre les lois, canons, interdictions qu’elle nous impose dans sa sagesse est un signe d’ignorance et d’orgueil manifeste.
   «Ils aiment l'Orthodoxie, disent-ils, mais ils se plaignent que ses jeûnes soient trop longs. Ils aiment l'Orthodoxie, mais les offices sont trop longs. Les barbes aussi sont trop longues et les soutanes sont de trop. De plus, l'Orthodoxie a trop de vigiles, trop de prosternations, trop d'épitimies, trop de saints canons dans le Pedalion … Et enfin, elle a trop d'anathèmes contre trop d’hérésies…» Photius Kontouglou
   Qu'arrive-t-il quand on veut être son propre législateur ? On supprime une chose, on en enlève une autre et finalement que reste-t-il ? Notre ego dans toute sa déchéance ! Il ne reste plus de notre Orthodoxie qu’un triste souvenir qui ronge notre conscience.
   Nous n’aurions même pas besoin d’Église si nous étions en mesure de nous diriger nous-mêmes sur le chemin du salut. Il n’y aurait que Dieu et moi. Mais c’est ce même moi qui a déjà fait chuter Lucifer qui ne voulut plus servir ni adorer Dieu mais être son propre Dieu. C’est ce moi (ego) qui est finalement notre pire ennemi et nous ne serons vraiment libres qu’une fois débarrassés de cet ennemi, ce qui suppose soumission et humilité.


archimandrite Cassien

samedi 22 mars 2014

3e Dimanche du Grand Carême


Vénération de la Sainte Croix
Marc 8,34-9,1
De l'Explication de l'évangile de saint Marc
par le bienheureux Théophylacte, archevêque d'Ochrid et de Bulgarie


34-37. Puis, ayant appelé la foule avec ses disciples, Il leur dit : Si quelqu'un veut venir après Moi, qu'il renonce à lui-même, qu'il se charge de sa croix, et qu'il Me suive. Car celui qui voudra sauver sa vie la perdra, mais celui qui perdra sa vie à cause de Moi et de la Bonne Nouvelle la sauvera. Et que sert-il à un homme de gagner tout le monde, s'il perd son âme ? Que donnerait un homme en échange de son âme ? [Dans ce passage de saint Marc et dans le commentaire qui suit, le mot grec psyché a été traduit tantôt par "vie", tantôt par "âme", car il a tous ces deux sens. V. aussi l'Explication de l'évangile de saint Matthieu par Théophylacte]

Comme Pierre L'avait réprimandé pour vouloir être crucifié, le Seigneur appela le peuple à Lui, et dit, devant tous, mais en dirigeant ses paroles surtout vers Pierre : "Me trouves-tu en faute, Pierre, parce que je prends la croix ? Je te dis que ni toi, ni personne d'autre ne sera sauvé, à moins de mourir pour la bonté et la vérité." Voyez que le Christ ne force pas l'homme de mourir sur la croix contre sa propre volonté. Il dit plutôt : "Quiconque désire". Le Seigneur dit : "Je ne contrains personne. Je l'invite à quelque chose de bon, non pas à quelque chose de mauvais auquel il doit être forcé. Quiconque ne veut pas de ces choses n'est pas digne d'elles." Nous pouvons apprendre ce que veut dire se renier soi-même si nous comprenons ce que veut dire renier un autre. Celui qui renie un autre est celui qui, quand il voit son frère, ou son serviteur, ou son père en train d'être fouetté, voire assassiné, ne se tourne pas vers lui pour compatir à sa souffrance, mais agit comme s'il lui était étranger. C'est de cette même manière que le Seigneur veut que nous n'ayons pas pitié de notre corps, de sorte que, même si nous sommes fouettés, ou pire, cela nous soit égal. Qu'il prenne sa croix, c'est-à-dire, qu'il accepte une mort très honteuse, puisque, à cette époque, mourir sur une croix était considéré comme la mort la plus honteuse. Mais comme beaucoup étaient crucifiés parce qu'ils étaient des bandits, le Seigneur ajouta à la crucifixion quelque chose d'autre : que l'on doit être vertueux. C'est ce qu'Il veut dire par : qu'il Me suive. Bien que son commandement de s'abandonner à la mort semblât dur et cruel, le Seigneur montre tout de suite que ce commandement est donné par amour pour le genre humain. Car quiconque perdra sa vie à cause de Moi la sauvera. (Mais la mort d'un homme condamné, ou de celui qui se pend n'est pas pour le Christ et n'apporte pas une telle récompense.) Et, au contraire, celui qui paraît avoir sauvé sa vie, loin de trouver la vie, la perdra en n'étant pas persévérant au temps de son martyre. Ne Me dites pas : "Mais il a sauvé sa vie" – cela ne veut rien dire. Même si vous dites qu'il a gagné aussi le monde entier, cela n'a aucun avantage. Personne ne peut échanger de l'argent pour son salut, car s'il en était ainsi, un homme qui a gagné le monde mais a perdu son âme, pourrait, pendant qu'il brûle dans les flammes de l'enfer, utiliser son argent pour acheter de l'innocence. Mais à ce moment et à cet endroit, on ne peut faire un tel commerce. Ici fermons la bouche de ceux qui disent, en suivant Origène, que toutes les âmes en enfer seront restaurées [et réunies à celles qui sont au ciel] après avoir été punies selon leurs péchés.
 Qu'ils entendent qu'il n'y a pas d'échange qui puisse y être fait pour délivrer l'âme. Personne n'est gardé en enfer en guise de punition. C'est plutôt le poids de ses propres péchés qui l'y retient.

38-9,1. Car quiconque aura honte de Moi et de mes paroles au milieu de cette génération adultère et pécheresse, le Fils de l'homme aura aussi honte de lui, quand Il viendra dans la Gloire de son Père, avec les saints anges. Il leur dit encore : Je vous le dis en vérité, quelques-uns de ceux qui sont ici ne mourront point, qu'ils n'aient vu le royaume de Dieu venir avec puissance.


La foi intellectuelle ne suffit pas, la confession de la foi de la bouche est requise aussi. Comme l'homme lui-même est double, que soit double aussi sa sanctification. L'âme est sanctifiée par la foi, mais le corps l'est par la confession. Quiconque donc aura honte de confesser que le Crucifié est son Dieu, le Crucifié aura aussi honte de lui. Car le Seigneur jugera que cet homme est un serviteur indigne lorsqu'Il viendra avec Gloire, escorté des anges, et non plus sous une humble forme. À sa seconde Venue, ll n'apparaîtra pas, comme Il le fit avant, de basses extraction et conditions, et comme un objet de mépris. Puisqu'Il parle de sa propre Gloire, Il désire montrer qu'Il ne se vante pas vainement, et dit : Il y aura quelques-uns qui sont là, nommément Pierre, Jacques et Jean, qui ne mourront pas avant que Je ne leur aie montré, lors de la Transfiguration, la Gloire avec laquelle J'apparaîtrai à la seconde Venue. Car la Transfiguration ne fut rien moins que la préfiguration de la seconde Venue, et comme Il apparut alors radieux, ainsi brillera-t-Il à la seconde Venue, de même que feront aussi les justes.

samedi 15 mars 2014

2e Dimanche du Grand Carême

2e Dimanche du Grand Carême
Le paralytique porté par quatre hommes
Marc 2,1-12
De l'Explication de l'évangile de saint Marc
par le bienheureux Théophylacte, archevêque d'Ochrid et de Bulgarie

1-5. Quelques jours après, Jésus revint à Capernaüm. On apprit qu'Il était à la maison, et il s'assembla un si grand nombre de personnes que l'espace devant la porte ne pouvait plus les contenir. Il leur annonçait la parole. Des gens vinrent à Lui, amenant un paralytique porté par quatre hommes. Comme ils ne pouvaient L'aborder à cause de la foule, ils découvrirent le toit de la maison où Il était, et ils descendirent par cette ouverture le lit sur lequel le paralytique était couché. Jésus, voyant leur foi, dit au paralytique : Mon enfant, tes péchés sont pardonnés.

Que veut dire : Quelques jours après ? (Théophylacte interprète ici pour son lecteur grec contemporain de 1100 ap. J-C. l'expression quelque peu difficile du grec du Nouveau Testament : δι᾽ ἠμερῶν.) Il signifie : "après que quelques jours sont passés". Quand Jésus fut entré dans la maison, le peuple entendit qu'Il était dedans et ils vinrent tous en courant, espérant qu'il serait facile de Le voir là. La foi de ces hommes était si grande qu'ils avaient même fait une ouverture dans le toit, par laquelle ils descendirent le paralytique. Sur ce, le Seigneur le guérit, voyant la foi de ceux qui le portaient, ou celle du paralytique lui-même. Car le paralytique n'aurait pas été d'accord pour y être porté s'il n'avait pas cru lui-même qu'il serait guéri. Souvent, le Seigneur guérit un malade incroyant en raison de la foi de ceux qui l'amenaient. Semblablement, Il guérissait souvent celui qu'on Lui amenait, à cause de la foi de cet homme, malgré l'incroyance de ceux qui l'avaient amené. D'abord, Il pardonne les péchés du malade, et ensuite Il guérit la maladie, puisque les maladies les plus graves nous arrivent pour la plupart par suite des péchés. C'est ainsi que le Seigneur dit du paralytique dans l'évangile de Jean que la paralysie de l'homme était le résultat de ses péchés (Jn 5,5-15). Mais le paralytique de l'évangile de Jean n'est pas le même que celui mentionné ici. Car l'homme dans le récit de Jean n'avait personne pour l'aider, tandis que cet homme-ci en avait quatre. Et celui-là était au bord de la piscine des Brebis, alors que celui-ci était dans la maison. Et celui-ci était à Capernaüm, alors que l'autre était à Jérusalem, pour ne parler que de quelques différences. Mais sachez que le paralytique mentionné par Matthieu (9,2-8) et celui mentionné ici par Marc sont un seul et même homme.

6-12. Il y avait là quelques scribes, qui étaient assis, et qui se disaient au-dedans d'eux : Comment cet homme parle-t-il ainsi ? Il blasphème. Qui peut pardonner les péchés, si ce n'est Dieu seul ?Jésus, ayant aussitôt connu par son Esprit ce qu'ils pensaient au dedans d'eux, leur dit : Pourquoi avez-vous de telles pensées dans vos cœurs ? Lequel est le plus aisé, de dire au paralytique : Tes péchés sont pardonnés, ou de dire : Lève-toi, prends ton lit, et marche ? Or, afin que vous sachiez que le Fils de l'homme a sur la terre le pouvoir de pardonner les péchés : Je te l'ordonne, dit-Il au paralytique, lève-toi, prends ton lit, et va dans ta maison. Et, à l'instant, il se leva, prit son lit, et sortit en présence de tout le monde, de sorte qu'ils étaient tous dans l'étonnement et glorifiaient Dieu, disant : Nous n'avons jamais rien vu de pareil.

Quand le Seigneur dit qu'Il pouvait pardonner des péchés, les pharisiens L'accusaient faussement de blasphème, puisque Dieu seul peut pardonner les péchés. Mais le Seigneur prouve encore davantage qu'Il est Dieu, en révélant ce qui est dans leur cœur. Dieu seul sait ce qui est dans le cœur de chacun, car, comme le dit le prophète : "seul Tu connais le cœur des enfants des hommes" (2 Chr 6,30, 1 Rois 8,39). En dépit du fait que le Seigneur avait révélé leurs pensées les plus intimes, les pharisiens restèrent insensés, n'admettant pas que Celui qui connaissait leurs cœurs pouvait guérir aussi leurs péchés. En guérissant le corps, le Seigneur rend crédible et certaine la guérison de l'âme aussi, confirmant l'invisible au moyen du visible, et le plus difficile par ce qui était plus facile, bien qu'il ne semblât pas ainsi aux pharisiens. Car les pharisiens pensaient qu'il était plus difficile de guérir le corps, parce que c'était quelque chose de visible. Et ils pensaient qu'il était facile à dire que l'âme avait été guérie, puisque cette guérison ne se voyait pas. Peut-être avaient-ils des pensées comme celles-ci : "Regardez cet imposteur. Il a refusé de guérir le corps qui est visible, et prétend plutôt guérir l'âme qui est invisible, disant : Que tes péchés te soient pardonnés. Certainement, serait-Il capable, Il guérirait le corps plutôt que de prétendre faire quelque chose que l'on ne peut voir." Le Seigneur leur montre donc qu'Il est capable de faire les deux, en disant : "Lequel est le plus aisé ? De guérir le corps ou de guérir l'âme ? Il est certainement plus facile de guérir le corps, mais vous pensez juste le contraire. Je vais donc guérir le corps, ce qui, en fait, est facile, bien que cela vous semble difficile. Ce faisant, Je confirmerai aussi la guérison de l'âme, ce qui est difficile, bien que cela vous semble facile car invisible et impossible à vérifier." Ensuite, Il dit au paralytique : Lève-toi et prends ton lit, pour confirmer encore davantage que le miracle n'était pas imaginaire, et aussi pour montrer qu'Il ne l'avait pas seulement guéri, mais l'avait rempli de force.


Le Seigneur fait de même pour nos maladies spirituelles. Non seulement Il nous délivre de nos péchés, mais Il nous remplit aussi de force pour faire ses commandements. Donc, moi aussi qui suis un paralytique, je peux être guéri. Car Christ est, en ce moment même, à Capernaüm, ce qui se traduit par "maison de réconfort et de consolation", ce qui est l'Église. Car la Maison du Consolateur est bien l'Église. Moi aussi, je suis un paralytique, car les facultés de mon âme sont inertes et ne peuvent pas mouvoir vers le bien. Mais si je suis porté par les quatre évangélistes et amené au Seigneur, je L'entendrai alors qui m'appelle : Enfant, (puisque, en faisant ses commandements, je deviens un fils de Dieu), et mes péchés me seront pardonnés. Mais comment puis-je être amené à Jésus ? Par une ouverture dans le toit. Et qu'est-ce que le toit ? C'est mon intellect, qui recouvre tout ce qui est en moi. C'est un toit fait de beaucoup de tuiles de terre et d'argile, qui signifient les affaires terrestres. Mais si toutes ces choses sont écartées, et la force de l'intellect en moi s'ouvre et se libère du poids des choses terrestres, alors je serai "descendu", c'est-à-dire je serai rendu humble. Car je ne dois pas me lever en orgueilleux, du fait que j'ai été déchargé des choses terrestres; mais plutôt, après avoir été déchargé des choses terrestres, je dois être descendu, c'est-à-dire rendu humble. Alors je serai guéri et prendrai mon lit, qui est mon corps, pour m'en servir en vue d'accomplir les commandements. Car je ne dois pas seulement me lever du péché et comprendre que je pèche; je dois aussi prendre mon lit, c'est-à-dire redresser mon corps, afin de le rendre prêt à faire le bien, Alors nous serons aussi capables de voir de nos yeux spirituels, de sorte que toutes nos pensées en nous pourront dire : Nous n'avons jamais rien vu de pareil, ce qui veut dire : "Nous n'avons jamais compris jusqu'à maintenant que nous avions été des paralytiques et que nous étions guéris maintenant". Seul celui qui a été purifié de ses péchés voit les choses telles qu'elles le sont en réalité.

mardi 11 mars 2014

nouvelles

Je viens d'arriver en Suisse où je resterai quelques jours afin d'y célébrer la divine Liturgie pour le dimanche de saint Grégoire Palamas. Ensuite je continuerai vers la France. Un voyage en Afrique se prépare mais rien de concret encore. 
Vôtre en Christ, 
archimandrite Cassien

Le bulletin 147 vient d'être publié !

Dimanche de l'Orthodoxie

1er Dimanche du Grand Carême
Dimanche de l'Orthodoxie

Peut-il venir de Nazareth quelque chose de bon ? 
Jean 1, 43-51

De l'Explication de l'évangile de saint Jean
par le bienheureux Théophylacte, archevêque d'Ochrid et de Bulgarie

43-45. Le lendemain, Jésus voulut Se rendre en Galilée, et Il rencontra Philippe. Il lui dit : Suis-Moi. Philippe était de Bethsaïda, de la ville d'André et de Pierre. Philippe rencontra Nathanaël, et lui dit : Nous avons trouvé Celui de qui Moïse a écrit dans la loi et dont les prophètes ont parlé, Jésus de Nazareth, fils de Joseph. 

André, après avoir écouté le Précurseur, et Pierre, après avoir écouté André, ont tous deux suivi le Christ. Mais il semble que Philippe, sans aucune suggestion de quelqu'un d'autre, obéit aussitôt à Jésus quand Il lui dit : Suis-moi. Comment fut-il convaincu de façon aussi instantanée ? Il apparaît, tout d'abord, que la Voix du Seigneur blessa son âme d'amour. Le son de la Voix du Seigneur n'était semblable à celui d'aucune autre; car en ceux qui étaient dignes, il allumait immédiatement un amour brûlant pour Lui. Comme le dirent Cleopas et l'autre disciple sur le chemin d'Emmaüs : Notre cœur ne brûlait-il pas au-dedans de nous, lorsqu'Il nous parlait en chemin et nous expliquait les Écritures ? (Lc 24, 32). De plus, Philippe avait sérieusement réfléchi dans son cœur, il étudiait constamment les livres de Moïse et attendait toujours la Venue du Christ; donc dès qu'il Le vit, il fut convaincu. C'est pourquoi il dit : Nous L'avons trouvé ! – ce qui montre qu'il L'avait toujours cherché. Peut-être avait-il appris aussi quelque chose d'André et de Pierre concernant le Christ. Puisqu'ils étaient de la même ville, il est vraisemblable qu'ils se soient parlé et aient discuté ensemble du Seigneur. L'évangéliste semble le laisser entendre lorsqu'il dit : Philippe était de Bethsaïda, de la ville d'André et de Pierre. C'était une ville très petite, plutôt comme un village. Nous devons donc nous émerveiller au pouvoir du Christ, qui choisit ses disciples les plus éminents à des endroits aussi insignifiants. Philippe ne garde pas cette bonne chose pour lui-même, mais la partage avec Nathanaël. Comme Nathanaël étudiait diligemment la Loi et la connaissait à fond, Philippe lui mentionne la Loi et les Prophètes. Philippe appelle le Seigneur "le fils de Joseph", puisqu'ils pensaient qu'Il était son enfant. Et il L'appelle "de Nazareth", bien qu'Il fût, à proprement parler, de Bethléem. Il naquit à Bethléem et fut élevé à Nazareth. Comme le mode de sa Naissance était caché à la plupart, tandis que son éducation était manifeste, ils L'appelaient Jésus de Nazareth.

46-48. Nathanaël lui dit : Peut-il venir de Nazareth quelque chose de bon ? Philippe lui répondit : Viens, et vois.  Jésus, voyant venir à Lui Nathanaël, dit de lui : Voici vraiment un Israélite, dans lequel il n'y a point de fraude. D'où me connais-Tu ? lui dit Nathanaël. Jésus lui répondit : Avant que Philippe t'appelât, quand tu étais sous le figuier, Je t'ai vu.

Philippe avait dit que le Christ était de Nazareth. Mais Nathanaël, versé dans la Loi, savait que, d'après les Écritures, le Messie devait venir de Bethléem. C'est pourquoi il dit : Peut-il venir de Nazareth quelque chose de bon ? Philippe répondit : Viens, et vois, sachant que, aussitôt après avoir goûté les Paroles du Christ, il ne Le quitterait jamais. Le Christ fait l'éloge de Nathanaël comme d'un vrai Israélite, qui n'a jamais rien dit ni pour plaire ni par inimitié. Les paroles de Nathanaël ne venaient pas d'un manque de foi, mais d'un intellect doué de discernement et bien versé dans la Loi, et qui savait que le Christ devait venir de Bethléem et non pas de Nazareth. Comment Nathanaël répond-il au Seigneur ? Devient-il orgueilleux à cause de ces propos de louange ? Pas le moins du monde. Persistant à désirer établir clairement et avec certitude l'identité de cet Homme, il demande : D'où me connais-Tu ? Alors, le Seigneur lui révèle sa Divinité même, en lui parlant de choses que personne ne pouvait savoir à part Nathanaël et Philippe, car ils ont parlé et agi sans témoin. Bien qu'Il ne fût pas présent, le Christ savait tout de la conversation entre Philippe et Nathanaël. C'est pourquoi Il dit : quand tu étais sous le figuier. Le Seigneur dit ces mots concernant Nathanaël, avant l'arrivée de Philippe, afin que personne ne pense soupçonner que Philippe Lui ait parlé du figuier et de sa conversation avec Nathanaël. Et Nathanaël comprit aussitôt qui était le Seigneur et Le confessa comme Fils de Dieu. Écoutez ce qu'il dit :

49-51. Nathanaël répondit et Lui dit : Rabbi, Tu es le Fils de Dieu, Tu es le Roi d'Israël. Jésus lui répondit : Parce que Je t'ai dit que Je t'ai vu sous le figuier, tu crois; tu verras de plus grandes choses que celles-ci. Et Il lui dit : En vérité, en vérité, vous verrez désormais le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre sur le Fils de l'homme. 

La prophétie a un grand pouvoir, plus grand même que les miracles, pour inciter un homme à croire. Les démons sont capables de simuler des miracles et ont l'air de les opérer. Mais personne ne peut avoir une connaissance d'événements futurs et les prédire avec exactitude, pas même un ange, et encore moins les démons. Donc le Seigneur attira à Lui Nathanaël en lui disant où il s'était tenu, que Philippe l'avait appelé à Lui, et qu'il était un vrai Israélite. Ayant entendu ces choses, Nathanaël entrevit la Grandeur du Seigneur autant qu'il le pouvait à ce moment-là,  et Le confessa comme Fils de Dieu. Cette confession ne fut pas cependant comme celle de Pierre (v. Mt 16,16-18). Pierre Le confessa comme Fils de Dieu, c'est-à-dire comme vrai Dieu. C'est pourquoi le Seigneur bénit Pierre et lui confia l'Église. Mais Nathanaël Le confesse simplement comme un homme qui, par la Grâce et par sa propre vertu, a été adopté comme fils de Dieu. C'est clair d'après ce qu'il dit ensuite : Tu es le Roi d'Israël. Voyez-vous ? Nathanaël n'a pas encore atteint la parfaite connaissance de la vraie Divinité du Seul-Engendré. Il croit en Lui comme en un homme bien-aimé de Dieu, comme au Roi d'Israël. S'il L'avait confessé comme vrai Dieu, il ne L'aurait pas appelé Roi d'Israël, mais Roi de toute chose. Donc le Seigneur ne le bénit pas comme Il bénit Pierre, et conduit ses pensées vers les hauteurs afin qu'il comprenne quelque chose de sa Divinité. Vous verrez désormais – dit-Il – les anges de Dieu monter et descendre sur le Fils de l'homme. Il dit par là : "Ne me comprenez pas comme un simple homme, mais plutôt comme le Maître des anges." Lui que les anges servent ne peut être un simple homme, mais seulement le vrai Dieu.


Tout cela, en fait, eut lieu à sa Crucifixion et à son Ascension. Comme le temps de sa Passion approchait, un ange du ciel le fortifia; à son Tombeau, il y avait un ange, et encore à son Ascension, comme le relate Luc (Actes 1,10-11). Certains ont compris le figuier comme représentant la Loi. Comme les figues, la Loi contient de la douceur, mais elle est difficile d'accès, couverte, comme de feuilles, par la rudesse des observations légales et la difficulté des commandements. Ils disent donc que le Seigneur vit Nathanaël, c'est-à-dire qu'Il le regarda avec faveur et connaissait ses pensées pendant qu'il était encore sous la Loi. Considère aussi cette interprétation, ô lecteur, si tu le trouves agréable : le Seigneur vit Nathanaël sous le figuier, c'est-à-dire sous la Loi, ou, dans la Loi, scrutant ses profondeurs. S'il n'avait pas scruté les profondeurs de la Loi, le Seigneur ne l'aurait pas vu. Sachez aussi que Galilée signifie "rouler en bas". Le Seigneur, donc, s'en alla à cet endroit du monde qui est tombé bas, c'est-à-dire à notre nature humaine. Et pendant que nous étions encore sous le figuier, sous l'emprise de la douceur du péché, qui est mêlée de beaucoup d'amertume à cause du regret et des châtiments qui la suivent, l'Ami de l'homme nous vit, et choisit ceux qui Le confessaient comme Fils de Dieu et Roi de chacun qui voit Dieu (car Israël signifie "voir Dieu"). En vérité, si nous persévérons avec zèle, Il nous comptera dignes de voir des choses plus grandes que celles-ci. Nous contemplerons des anges montant à la hauteur de la connaissance divine de Lui, et descendant encore, parce qu'ils ne peuvent connaître son Essence inconnaissable. En un autre sens, un homme monte quand il se plonge dans l'étude de la Divinité du Seul-Engendré, et il descend quand il est ravi dans la contemplation de son Incarnation et de sa Descente aux enfers.