samedi 14 septembre 2013

HOMÉLIE POUR LE 12e DIMANCHE DE MATTHIEU


Lecture du saint Évangile selon Matthieu (19,16-26)

En ce temps-là, un homme s'approcha de Jésus et lui dit : Bon Maître, que dois-je faire de bon pour posséder la vie éternelle ? Jésus répondit : Pourquoi dis-tu que je suis bon ? Nul n'est bon que Dieu seul ! Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements. – Lesquels ? lui dit-il. – Eh bien, reprit Jésus : «Tu ne tueras pas, tu ne commettras pas d'adultère, tu ne voleras pas, tu ne porteras pas de faux témoignage, honore ton père et ta mère» et tu aimeras ton prochain comme toi-même.» Le jeune homme lui dit : Tout cela, je l'ai observé dès ma jeunesse; que me manque-t-il encore ? Jésus lui dit : Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel; puis viens, et suis-moi ! Quand il entendit ces paroles, le jeune homme s'en alla contristé, car il avait de grands biens. Jésus dit alors à ses disciples : En vérité je vous le dis, il sera difficile à un riche d'entrer dans le royaume des cieux. Oui, je vous le répète, il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu ! A ces mots les disciples furent très étonnés et demandèrent : Qui donc peut être sauvé ? Jésus les regarda et leur dit : C'est impossible pour les hommes, mais tout est possible pour Dieu.

Mes chers, essayons de décortiquer un peu ce dialogue, entre le Christ et ce jeune homme, que nous venons d’entendre.
Ce jeune homme posa la question : «Que dois-je faire de bon pour posséder la vie éternelle ?» Cette même question un docteur de la loi la posa également. (cf. Lc 10,25) Au jeune homme, Jésus dit d’observer la Loi. Par contre, au docteur de la loi, qui était sensé bien connaître la Loi, le Seigneur posa la question : «Qu’est-il écrit dans la Loi, qu’y lis-tu ?» Chaque fois le Seigneur s’adapta à son interlocuteur, selon les dispositions et selon la connaissance de celui-ci.
Ce jeune homme considérait Jésus comme un docteur de la Loi et non comme Dieu. C’est pour cela que le Seigneur lui dit : «Pourquoi dis-tu que je suis bon ? Nul n'est bon que Dieu seul !»
Dès sa jeunesse, ce jeune homme observait la Loi mais il sentait que quelque chose lui manquait encore, que la perfection ne consiste pas à ne pas faire ceci ou cela mais qu’elle doit consister en quelque chose de plus positif. Le docteur de la Loi a bien répondu en disant : «Tu aimeras …» et le Seigneur lui dit «Tu as bien répondu.»
Avoir «de grands biens» et ne pas faire le mal, c’est insuffisant. Ce n’est pas la perfection évangélique, qui consiste à faire de grands biens et pas seulement d’en avoir. «Donne-le aux pauvres», ces grands biens, soit miséricordieux, généreux et charitable ! Donnes-en aux pauvres – selon la disposition du coeur –, est demandé à chaque chrétien, et selon cette générosité on sera récompensé dans l’autre vie. Au jeune homme riche pourtant le Seigneur ne dit pas : Donnes-en, mais donne-le, c’est-à-dire donne tout. «Si tu veux,» donc un conseil et non une obligation. Etre charitable envers le prochain, c’est une obligation et nous seront jugés sur cela : «J’ai eu faim et vous ne m’avez pas donné à manger,» (Mt 25,42) etc. Etre parfait, nous est conseillé. «Soyez donc parfait comme votre Père est céleste.» (Mt 5,48) Dieu nous le demande mais ne nous y oblige pas. Pour «entrer dans la vie», il suffit d’observer les commandements, mais pour être parfait, il nous est demandé de nous séparer des richesses terrestres, non qu’elles soient mauvaises en eux-mêmes mais à cause de notre faiblesse morale. Quand nous seront arrivés au niveau spirituel de l’apôtre Paul, alors nous pourrons dire aussi : «Je sais vivre dans l’humiliation, et je sais vivre dans l’abondance. En tout et partout j’ai appris à être rassasié et à avoir faim, à être dans l’abondance et à être dans la disette. Je puis tout par celui qui me fortifie.» (Phil 4,12-13) Pour y arriver, il faut passer par le sacrifice, car notre coeur est attaché à ces richesses et la tristesse nous accable dès que nous en perdons quelque chose, comme ce jeune homme riche. Y arriver sans le renoncement est «impossible pour les hommes», comme dit l’évangile et seule la Miséricorde de Dieu peut y suppléer. C’est pour cela qu'au Dernier Jugement, seule cette Miséricorde peut nous sauver, si nous ne sommes pas arrivés à la perfection ici-bas, qui demande également l’aide de Dieu. Encore une fois, ce n’est pas la richesse en elle-même qui est une entrave mais notre attachement passionnel, notre coeur vicié.
«Puis viens, et suis-moi,» dit le Seigneur au jeune homme, comme aux apôtres. «Jésus vit un homme assis au lieu des péages, et qui s’appelait Matthieu. Il lui dit : Suis-moi !» (Mt 9,9) Il nous est demandé, à notre tour, de suivre spirituellement le Christ, et cela suppose de porter la croix, qui consiste au renoncement à nos passions, que le renoncement matériel facilite, et, que la richesse entrave, comme nous venons de dire.
Je m’explique un peu maladroitement sur ces choses si simples, mais votre sagacité saura saisir ce que je veux dire.

Archimandrite Cassien


N'avez-vous pas le courage de rester vierge, il vous est permis de vous marier. 
Ne pouvez-vous vous priver de toute fortune, il vous est permis de la garder, 
pourvu que vous en fassiez part aux pauvres.

Saint Jean Chrysostome (homélie 2 sur l’épître aux Philippiens)

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