samedi 17 juillet 2021

HOMÉLIE SUR LE CENTURION

 «En ce temps-là, comme Jésus entrait à Capharnaüm, un centurion vint le trouver et lui fit cette prière : Seigneur, j'ai à la maison un serviteur atteint de paralysie, et il souffre beaucoup. Jésus lui dit : Je vais aller le guérir. Le centurion répondit : Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri. Car moi, qui ne suis qu'un subalterne, j'ai sous moi des soldats, et je dis à l'un : Va ! et il va, à un autre : Viens ! et il vient, et à mon serviteur : Fais ceci ! et il le fait. A ces mots, Jésus fut dans l'admiration et il dit aux assistants : En vérité je vous le dis, chez personne en Israël je n'ai trouvé pareille foi. Aussi, je vous le dis, beaucoup viendront de l'orient et de l'occident et prendront place au festin avec Abraham, Isaac et Jacob dans le royaume des cieux, tandis que les fils du royaume seront jetés dans les ténèbres extérieures, où il y aura des pleurs et des grincements de dents. Puis il dit au centurion : Va, et qu'il t'advienne selon ta foi ! Et sur l'heure le serviteur fut guéri.» (Mt 8,5-13)



Voici quelques mots sur l’évangile d’aujourd’hui, le quatrième dimanche de Matthieu.

L’évangéliste Matthieu dit simplement : «un centurion vint le trouver et lui fit cette prière.» Luc par contre est plus explicite : «Ayant entendu parler de Jésus, il lui envoya quelques anciens des Juifs, pour le prier de venir guérir son serviteur. Ils arrivèrent auprès de Jésus, et lui adressèrent d’instantes supplications, disant : Il mérite que tu lui accordes cela; car il aime notre nation, et c’est lui qui a bâti notre synagogue. Jésus, étant allé avec eux, n’était guère éloigné de la maison, quand le centenier envoya des amis pour lui dire : Seigneur, ne prends pas tant de peine; car je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit.» (Luc 7,3-6)

Ces deux récits semblent être en désaccord, ce qui ne peut se résoudre que si l’on admet qu’il y a trois étapes : d’abord Jésus fut abordé par des anciens des Juifs, et en s’approchant de la maison, le centurion envoya des amis pour lui dirent : «Seigneur, ne prends pas tant de peine …» Mais finalement le Seigneur continua quand même son chemin en se dirigeant vers la maison et c’est finalement le centurion qui lui-même parla : «C’est aussi pour cela que je ne me suis pas cru digne d’aller en personne vers toi.»

Par contre Matthieu raconte ce que Luc omet : «En vérité je vous le dis, chez personne en Israël je n'ai trouvé pareille foi. Aussi, je vous le dis, beaucoup viendront de l'orient et de l'occident et prendront place au festin avec Abraham, Isaac et Jacob dans le royaume des cieux, tandis que les fils du royaume seront jetés dans les ténèbres extérieures, où il y aura des pleurs et des grincements de dents.»

Il est connu que lors de tout événement, chaque témoin le raconte à sa manière et que chacun développe plus en détail ce qui lui semble plus important. Par conséquent, les deux évangélistes se complètent et ne se contredisent nullement.

Un détail : Le centenier avait cent soldats sous ses ordres et il servait dans l’armée romaine qui occupait Israël.

Ce que les deux évangélistes relatent pareillement me semble le plus important : «…dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri !» C’est cette foi du le centenier qu’admira même le Christ et qui lui fit dire : «En vérité je vous le dis, chez personne en Israël je n'ai trouvé pareille foi.» Luc dit : «Je vous le dis, même en Israël je n’ai pas trouvé une aussi grande foi.»

Saint Ambroise explique : «Si vous lisez : Je n’ai trouvé chez personne autant de foi dans Israël, le sens est simple et facile, mais si vous lisez selon le texte grec : Je n’ai pas trouvé une si grande foi, même dans Israël, la foi de cet homme est mise au-dessus même des élus et de ceux qui voient Dieu.»

Pourquoi l’admiration du Sauveur qui sait tout ? Bède le Vénérable dit : «Si donc le Seigneur se laisse aller à l’admiration, c’est pour nous faire partager le même sentiment, car toutes ces émotions de l’âme, lorsqu’on les attribue à Dieu, ne sont point un signe de trouble intérieur, mais une leçon salutaire qu’il nous donne.»

«De retour à la maison, les gens envoyés par le centenier trouvèrent guéri le serviteur qui avait été malade,» conclut Luc. Cela suppose que le centenier s’approcha de Jésus, qui était encore en chemin, – pour lui parler. Matthieu dit : «Va, et qu'il t'advienne selon ta foi !» «Va», cela veut dire : retourne dans ta maison.

«Et sur l'heure le serviteur fut guéri.» C’est donc à distance que la guérison a eu lieu, sans que le Christ ait vu ou touché le serviteur. C’est cette foi admirable du centenier qui suppléa à la foi du serviteur, comme nous le voyons également dans la guérison du paralytique : «Jésus, voyant leur foi, dit au paralytique : Mon enfant, tes péchés sont pardonnés.» (Mc 2,5) Il est dit : «leur foi,» donc celle «des gens qui vinrent à lui, amenant un paralytique porté par quatre hommes.» 




De ceux qui «viendront de l'orient et de l'occident et prendront place au festin avec Abraham, Isaac et Jacob dans le royaume des cieux,» nous en parlerons une autre fois, si Dieu nous prête vie.


a. Cassien


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