samedi 19 février 2022

HOMÉLIE POUR LE DIMANCHE DU FILS PRODIGUE


 La parabole d’aujourd’hui concerne l’humanité dans son ensemble, et chacun de nous en particulier. Tous, nous avons dilapidé l’héritage paternel, c’est-à-dire la ressemblance avec Dieu. «Tout son avoir», dit l’évangile. Il ne nous reste que l’image (selon Dieu) – la liberté de choisir entre le bien et le mal. Au lieu des vertus, en lesquelles consiste notre ressemblance avec Dieu, les vices se sont installés. 

«Le bien de l’homme, c’est la raison accompagnée du libre arbitre; tout ce que nous tenons de la main libérale de Dieu, peut aussi être regardé comme notre bien, le ciel, la terre, toutes les créatures, la loi et les prophètes.» (Théophylacte) 

C'est le chemin du repentir, en d’autres termes, du revirement, de la pénitence, qu’il faut prendre. 

Le grand Carême est devant la porte, et nous chantons : «Ouvre nous les portes de la pénitence ...» C’est un chemin qu’il faut parcourir, et qui dure toute notre vie; il demande effort et persévérance. 

Si les hommes actuels ne prennent pas ce chemin, le même sort les attend que celui des Sodomites d'autrefois. Jamais l’humanité n’avait été si bas, si loin de Dieu, et la voix de l’ange, dont parle l’Apocalypse, se fera entendre : «Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la grande. (Apo 18,2) Le texte explique ensuite ce qu’est cette Babylone : «une habitation de démons, un repaire de tout esprit impur, un repaire de tout oiseau impur et odieux, parce que toutes les nations ont bu du vin de la fureur de son impudicité, et que les rois de la terre se sont livrés avec elle à l’impudicité, et que les marchands de la terre se sont enrichis par la puissance de son luxe.» 

La parabole parle des carouges, dont le fils prodigue voulait se rassasier, et qui symbolisent les vices. «Mais personne ne lui en donnait,» dit l’évangile, c’est-à-dire les vices ne nous rassasient jamais et nous laissent toujours à notre faim, en l’augmentant même. Les pourceaux en mangent, selon l’évangile; cela veut dire que ce n’est pas la nourriture de l’homme mais des animaux impurs. 

C’est «une espèce de légume vide au-dedans et assez tendre à l’extérieur, qui remplit le corps sans le fortifier, et qui, par conséquent, est plus nuisible qu’utile,» dit saint Ambroise. 

«Il alla se mettre au service d'un des habitants de la contrée,» marque l’évangile. Qui sont ces habitants, sinon les malins esprits, auxquels nous sommes assujettis ? Et on «garde les porcs.» 

«Cet habitant de cette région, c’est quelque puissance de l’air, faisant partie de la milice du démon.» (Saint Augustin : Quest. évang.) 

En prenant conscience, le fils prodigue se repentit et prit le retour vers la maison paternelle. Prenons conscience, en profondeur, de notre état de déchéance, et le chemin du salut s’ouvrira pour nous ! Tant que nous y «bricolons» seulement, en nous contentent de quelques pratiques extérieures, nous n’avançons pas vraiment, nous piétinons sur place. 

En quoi consiste réellement le vrai repentir ? N’est-ce pas en ce que nous ouvrons notre cœur, et entendons la voix de Dieu qui frappe pour entrer. «Voici, je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui, je souperai avec lui, et lui avec moi.» (Apo 3,20) 

En d’autres termes, c’est rentrer en soi-même, comme dit l’évangile. «Il a bien raison de rentrer en lui-même, lui qui s’en est tant éloigné; car en retournant à Dieu, on se rend à soi-même, et on s’en sépare quand on se sépare de Jésus Christ.» (saint Ambroise) 

Avec le psalmiste, nous chantons aujourd’hui, – après le Polyéléos : «Sur les bords des fleuves de Babylone, nous étions assis et nous pleurions, en nous souvenant de Sion...» (Ps 136) Pour les Hébreux, leur exil était à Babylone. Notre exil à nous, c’est l’éloignement de l’état paradisiaque, loin d’Eden. 

«Apportez vite la plus belle robe pour l'en revêtir,» poursuit l’évangile. Qu’est-ce que cette robe ? «C’est la dignité qu’Adam a perdue par son péché : les serviteurs qui l’apportent sont les prédicateurs de la réconciliation», dit le vénérable Augustin. 

«... un anneau au doigt et des chaussures aux pieds,» demande d’autres explications, qu’on laisse pour une autre fois. 


a. Cassien 




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