samedi 11 octobre 2014

Homélie Luc 2

HOMÉLIE POUR LE SECOND DIMANCHE DE LUC

Le Seigneur dit : Ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le-leur pareillement ! Si vous aimez ceux qui vous aiment, quel gré vous en saura-t-on, les pécheurs aussi aiment ceux qui les aiment. Et si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quel gré vous en saura-t-on ? Les pécheurs aussi font de même. Et si vous faites des prêts à ceux dont vous espérez pouvoir être remboursés, quel gré vous en saura-t-on ? Les pécheurs aussi prêtent aux pécheurs avec l’espoir de recouvrer ce qui leur appartient. Aimez donc vos ennemis, faites du bien, prêtez sans rien attendre en retour… Votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, parce que Lui-même est bon à l'égard des ingrats et des méchants. Soyez donc miséricordieux comme votre Père est miséricordieux, lui aussi. 
(Luc 6,31-36)

Ce que le Christ nous demande par ces paroles est exigeant, mais le psaume ne dit-il pas : «à cause des paroles de tes lèvres, je me suis maintenu en des voies ardues.» (Ps 16,4). L’évangile, de son côté, indique qu’«étroite est la porte, resserré le chemin qui mènent à la vie» (Mt 7,14). Aux chrétiens un effort extrême est demandé, non comme aux juifs d’autrefois, qui se contentaient des pratiques ritualistes.
Je m’explique par un épisode : il y a des années, lors d’un pèlerinage en Grèce, une roue de la voiture avait crevé. Nous étions huit dans la familiale. On se contentait de serrer les boulons à peu près, et un peu plus loin, après deux tonneaux, nous nous retrouvions dans le décor. La voiture était pour la casse mais nous, par miracle, nous étions indemnes.
Un autre épisode : Un fidèle, qui est décédé depuis, m’a dit autrefois qu’il faisait la part du feu dans sa vie spirituelle. Cette négligence, il peut la regretter toute l’éternité et espérer qu’au dernier Jugement, le Seigneur, qui est un Juge miséricordieux mais aussi juste, lui fera miséricorde. C’est pourtant un Juge qui ne se laisse corrompre ni intimider, comme les juges terrestres, et il me semble que c’est un jeu risqué que de compter sur la Miséricorde divine et négliger de corriger sa volonté mauvaise.
Il y a des domaines où un à peu près, une négligence sont fatals. Un athlète qui ne fait pas un effort extrême, ne donne pas tout, ne gagnera pas le prix. Un calcul mathématique, fait à peu près, sera faux. Un vaisseau spatial, qui n’est pas dirigé exactement sur l’étoile visée passera à des milliers de km à côté.
Reprenons : Dieu nous  propose, mais Il ne force personne, comme l’illustre l’histoire suivante :
Abba Lot alla trouver abba Joseph et lui dit : «Père, selon que je peux, je récite un court office, je jeûne un peu, je prie, je médite, je vis dans le recueillement, et autant que je peux, je me purifie de mes pensées. Que dois-je faire de plus ?» Alors le vieillard se leva et étendit ses mains vers le ciel. Ses doigts devinrent comme dix lampes de feu et il lui dit : «Si tu veux, deviens tout entier comme du feu.»
Il vaut mieux avoir les mains sales, en se fatiguant pour son salut, que d’avoir les mains propres en ne faisant rien. Les mains sales, c’est-à-dire en se trompant parfois, en chancelant et en tombant même sur le chemin qui mène à la vie, pourvu qu’on se relève chaque fois.
Chacun est libre d’œuvrer à son salut, mais on ne récolte que ce que l’on a semé et rien de plus. Si on ne cherche que des avantages terrestres, comme le suggère l’évangile d’aujourd’hui, alors on aura sa récompense ici-bas. Ce qui nous est demandé, c’est de dépasser nos aspirations naturelles, de lutter contre ce qui nous répugne, en un mot de faire violence à notre vieil homme handicapé par ses vices.
Dieu «fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes,» dit l’évangéliste Matthieu (Mt 5,45). Ce qui nous est demandé c’est de ne pas réserver notre bonté à ceux qui nous semblent bons mais également à ceux qui nous font du mal, qui nous trompent. C’est bien difficile. On a plutôt tendance à se détourner ou à se venger.
«Vous me direz, comment pouvoir mettre en pratique ce précepte ? Quoi ! en voyant Celui qui S’est fait homme et qui a tant souffert pour vous, vous hésitez encore, et vous demandez comment on peut pardonner à ses frères les outrages dont ils se sont rendus coupables ? Mais qui donc d’entre vous a jamais souffert d’aussi grands outrages que votre Seigneur, chargé de chaînes, flagellé de coups, couvert de crachats, et enfin mis à mort ?» (saint Jean Chrysostome, Homélie 18 sur Matthieu)
Qu’est-ce que je peux dire de plus ? À chacun sa conscience, ses prédispositions et son ouverture au prochain et à Dieu !

archimandrite Cassien

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