mercredi 27 mai 2020

HOMÉLIE POUR L’ASCENSION

Voici quelques miettes du festin que j’ai pu ramasser dans les évangiles, nos pères théophores, les hymnographes et dans l’iconographie.
Commençons avec les évangiles qui sont peu loquaces sur cet événement, pourtant fort important, qui est le point culminant de l’économie du salut de notre Sauveur.
Jean ne dit rien de l’Ascension et Matthieu juste du «lieu que Jésus leur avait désigné» (Mt 28,18). Marc de sont côté, dit un peu plus : «Après leur avoir parlé, le Seigneur fut enlevé au ciel et il s'assit à la droite de Dieu.» (Mc 16,19) Ce n’est que Luc qui en dit davantage : «Puis il les conduisit vers Béthanie et, levant les mains, il les bénit. Or, tandis qu'il les bénissait, il se sépara d'eux et fut enlevé au ciel.» (Luc 24,50)
«Il les conduisit vers Béthanie,» ce qui suppose qu’ils étaient rassemblés à Jérusalem. Or Béthanie était «près de Jérusalem, à quinze stades environ,» selon saint Jean (Jn 11,18) Les Actes (19,10) disent : «la distance d’un chemin de sabbat.» Ils étaient rassemblés dans la ville. «Vous autres, restez en ville, jusqu’à ce que vous soyez revêtus d’une force d’en haut.» (Luc 24,49) Dans les Actes des Apôtres (1,4) est écrit : «Au cours d’un dernier repas, il leur enjoignit de ne pas quitter Jérusalem.» On dirait : confinés, aujourd’hui, mais il n’y avait heureusement ni Corona ni les Mercrons, en ce temps-là. Après l’Ascension, «ils retournèrent à Jérusalem en grande joie,» ce qui indique donc qu’ils venaient de Jérusalem, puisqu’ils y retournèrent.
Pour la Résurrection du Christ, il est dit qu’il est ressuscité et pour l’Ascension qu’il fut enlevé au ciel. Pourquoi une fois il est et l’autre fois il fut ? Quelle est la différence ? Lors de l’Ascension c’est l’humanité du Christ qui monta au ciel, comme prémices pour tous les hommes. La divinité du Sauveur n’a jamais quitté la droite de son Père. C’est donc l’humanité qui fut
Saint Grégoire le Grand, ou le Dialogue, dit : «Nous savons par l'Ancien Testament, qu'Elie a été enlevé au ciel (cf. 4 R 2). Mais il faut distinguer ici entre le ciel éthéré et le ciel aérien ou atmosphérique qui est plus rapproché de la terre. Elie fut donc enlevé dans le ciel aérien, et déposé dans une région secrète du monde pour y vivre dans une paix profonde de l'âme et du corps, jusqu'à ce qu'il revienne à la fin du monde et paie son tribut à la mort. Remarquons aussi qu'Elie a été emporté sur un char, pour démontrer clairement que n'étant qu'homme il avait besoin d'un secours étranger; notre Rédempteur, au contraire, n'a eu besoin ni d'un char, ni des anges pour monter au ciel; Créateur de toutes choses, il s'élevait par sa propre vertu au-dessus de tous les éléments.»
«Il s'assit à la droite de Dieu.» Il y est question de l’humanité, car depuis tout éternité le Fils de Dieu y est assis. «Il ne faut point entendre qu'il est assis comme les hommes ont coutume de s'asseoir, et dans ce sens que le Père serait assis à la gauche, et le Fils à la droite; la droite, c'est la puissance qu'il a reçue de Dieu comme homme pour venir juger les hommes après qu'il était venu pour être jugé par eux. L'expression s'asseoir ou résider, a le même sens qu'habiter; ainsi nous disons d'un homme, il s'est assis ou il a résidé dans ce pays pendant trois ans; c'est donc ainsi que Jésus Christ habite à la droite de Dieu le Père, il est heureux et il habite au sein de la béatitude, qui est appelée la droite du Père. Là, on ne connaît que la droite, parce qu'il n'y a plus aucune souffrance,» selon le vénérable Augustin (du Symbole).
«Lorsque les disciples, ravis l'admiration, suivaient des yeux le Seigneur montant au ciel, deux anges, vêtus de blanc et brillants de splendeur, se présentèrent à eux, et leur dirent : Hommes de Galilée, pourquoi vous arrêtez-vous à regarder le ciel ? Ce Jésus qui, en vous quittant, s'y est élevé, reviendra de la même manière que vous l'avez vu monter au ciel. (Ac 1,11) «Ces paroles apprennent à tous les enfants de l'Église, que notre Seigneur Jésus Christ reviendra visiblement un jour dans cette même chair avec laquelle il est monté au ciel.» (saint Léon le Grand, homélie 2 pour l’Ascension) Les Actes des Apôtres complètent donc les évangiles en parlant de deux anges, – je suppose que c’étaient les mêmes anges qui annoncèrent la Résurrection aux myrophores près du tombeau – et ensuite : «il fut élevé pendant qu’ils le regardaient, et une nuée le déroba à leurs yeux. Et comme ils avaient les regards fixés vers le ciel pendant qu’il s’en allait, voici, deux hommes vêtus de blanc leur apparurent, et dirent : Hommes Galiléens, pourquoi vous arrêtez-vous à regarder au ciel ? Ce Jésus, qui a été enlevé au ciel du milieu de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu allant au ciel. Alors ils retournèrent à Jérusalem, de la montagne appelée des oliviers, qui est près de Jérusalem, à la distance d’un chemin de sabbat.» (Ac 1,9-12) Dans une autre homélie dit saint Léon : «non seulement les apôtres, mais tous les disciples qui avaient perdu courage en le voyant souffrir le supplice de la croix, et qui avaient douté de sa résurrection, ranimés et fortifiés par la manifestation réelle de sa présence, loin de s'abandonner à la tristesse lorsqu'ils le virent monter au ciel, furent comblés de joie. Et, en effet, y eut-il jamais un sujet plus légitime de se réjouir que dans cet heureux moment où la nature de l'homme s'élevait, en présence de cette sainte assemblée, au-dessus de tous les esprits célestes, au-dessus de tous les ordres des anges et des archanges, sans trouver dans sa glorieuse ascension, par de-là tous les cieux, aucun obstacle qui l'arrêtât jusqu'à ce que, reçue dans le sein du Père éternel, elle fût assise sur le trône de celui qui reconnaissait dans son Fils la nature divine par laquelle il lui est égal ?»
Complétons avec des chants de la fête : «Sans quitter le sein paternel sur terre partageant notre humanité, très doux Jésus, tu remontes en ce jour vers le ciel glorieusement depuis la montagne des Oliviers, relevant par compassion notre nature déchue pour l'asseoir à côté du Père avec toi; les puissances incorporelles dans les cieux, frappées d'admiration et d'effroi, magnifient l'amour dont tu aimes les humains; et nous sur terre, avec elles nous glorifions ta condescendance envers nous et ton Ascension, en disant : Seigneur qui remplis d'une ineffable joie au jour de ton Ascension tes disciples et la Mère de Dieu qui t'enfanta, donne-nous aussi, par leurs prières, la joie de tes élus et la grâce du salut.» (Grand Vêpres, Lucernaire)
L’iconographie met, pour ainsi dire, le sceau sur ces témoignages, comme nous le voyons sur l’icône ci-dessous.

archimandrite Cassien


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