dimanche 1 juin 2014

Dimanche de 318 saints Pères

7e Dimanche de Pâques
Dimanche des Pères du Premier Concile Œcuménique
Jean 17,1-13
De l'Explication de l'évangile de saint Marc
par le bienheureux Théophylacte, archevêque d'Ochrid et de Bulgarie

1-3. Après avoir ainsi parlé, Jésus leva les yeux au ciel, et dit : Père, l’heure est venue ! Glorifie ton Fils, afin que ton Fils Te glorifie, selon que Tu Lui as donné pouvoir sur toute chair, afin qu’Il accorde la vie éternelle à tous ceux que Tu Lui as donnés. Or, la vie éternelle, c’est qu’ils Te connaissent, Toi, le seul vrai Dieu, et Celui que Tu as envoyé, Jésus Christ.

Ayant encouragé ses disciples à affronter courageusement les tribulations à venir, le Christ leur remonta encore le moral, cette fois-ci par la prière. En priant, Il nous enseigne que lorsque des tentations nous assaillent, nous devons mettre toutes autres choses de côté et nous réfugier en Dieu. Cependant, on pourrait dire que Jésus ne priait pas en réalité, mais conversait avec le Père. Ne soyez pas surpris de ce qu’il est dit ailleurs que Jésus priait, en s’agenouillant par terre (v. Mt 26,39). Car le Seigneur est venu, non seulement pour Se révéler à nous, mais pour nous enseigner toute vertu par son propre exemple, en bon éducateur. En nous montrant qu’Il va de plein gré à sa Crucifixion, Il dit : Père, l’heure est venue ! Voyez combien Il languit pour la Passion et l’accueille. Il l’appelle sa Gloire, et la Gloire de son Père, car en effet, par la Passion, tous les deux furent glorifiés. Avant la Crucifixion, Il était pratiquement inconnu, même par les Juifs : Israël ne Me connaît pas (Is 1,3), dit-Il. Après, le monde entier affluait à Lui.

Qu’est-ce, exactement, que la «Gloire» qui appartient à Lui et au Père ? C’est le bénéfice de toute chair par les Dons de Dieu. C’est cela, la Gloire de Dieu. Le Seigneur avait auparavant ordonné à ses disciples de ne pas suivre la voie des Gentils (Mt 10,5). Maintenant, la Grâce n’est plus limitée aux Juifs. Elle est offerte au monde entier. À cet effet, le Seigneur projetait d’envoyer les apôtres vers les Gentils. Mais de crainte que les disciples ne s’imaginent que ce projet était sa propre Idée, contraire à la Volonté du Père, Jésus leur rappelle que c’est le Père qui Lui a donné pouvoir sur toute chair. En quel sens le Christ a-t-Il pouvoir sur toute chair, alors que, comme nous le savons, tout le monde ne croit pas ? Le Christ S’efforce d’amener tout le monde à la foi. Si certains refusent de L’écouter, ce n’est pas de sa faute, mais la faute de ceux qui rejettent son Enseignement. Quand il est dit que le Père «donne» quelque chose au Fils, ou que le Fils «reçoit» quelque chose du Père, comprenez que de telles expressions sont une condescendance à la compréhension limitée de ses auditeurs, comme nous l’avons signalé plus tôt. Le Christ était toujours attentif à éviter de parler ouvertement de sa Divinité. Les Juifs auraient été outrés de L’entendre Se déclarer divin, donc Il disait seulement autant qu’ils pouvaient porter à ce moment. Nous usons d’une condescendance semblable quand nous parlons à des enfants : sans nommer l’objet, nous montrons le pain ou l’eau et demandons : «Veux-tu de cela ?» Souvenez-vous comment, au début de l’évangile, l’évangéliste affirma avec audace, concernant le Christ : Toutes choses ont été faites par Lui (Jn 1,3), et À tous ceux qui L’ont reçu, Il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu (Jn 1,12). Comment peut-Il donc, Lui qui donne à d’autres le pouvoir de devenir enfants de Dieu, manquer de Divinité en Lui-même et la demander comme un Don au Père ? Comprenez donc qu’une réalité supérieure est à la base de l’humble déclaration. À tous ceux à qui Tu L’as donné – voilà l’expression modeste ; afin qu’Il leur donne la vie éternelle – ici, la révélation du pouvoir et de l’autorité de la Divinité seul-engendré.

Si Dieu seul donne la vie physique, combien plus la vie éternelle ! Le Christ appelle le Père le seul vrai Dieu, à la différence des faux dieux des Gentils, mais en aucun cas Il ne S’exclue Lui-même de la Divinité du Père. Parce qu’Il est le vrai Fils, Il doit aussi être le vrai Dieu, comme l’évangéliste insiste dans son épître catholique : Jésus Christ… est le Dieu véritable et la vie éternelle (I Jn 5,20). Sur la base du présent texte de l’évangile, les hérétiques feraient du Fils un faux dieu et auraient le Père comme leur seule Divinité. Ils devraient faire attention à ne pas oublier tout le reste écrit par saint Jean, qui nous dit également que le Fils est la vraie Lumière (Jn 1,9). Selon leur raisonnement, cela doit signifier que le Père est une fausse Lumière ! Donc, si l’évangéliste appelle le Père le seul vrai Dieu, c’est pour Le distinguer des faux dieux de Grecs, et non pas du Fils. D’ailleurs, les hérétiques relient ce passage : vous … ne cherchez point la Gloire qui vient de Dieu seul (παρὰ τοῦ μόνου θεοῦ, Jn 5,44) à celui que nous avons discuté. Ils s’imaginent que cela renforce leur argument que si le Père est le seul vrai Dieu (ὁ μόνος Θεός), le Fils ne peut être Dieu. Quelle absurde conclusion !

4-6. Je T'ai glorifié sur la terre, J'ai achevé l'œuvre que Tu M'as donnée à faire. Et maintenant Toi, Père, glorifie-Moi auprès de Toi-même de la gloire que J'avais auprès de Toi avant que le monde fût. J'ai fait connaître ton Nom… 

Cela nous apprend que le Père glorifie le Fils de la même manière que le Fils glorifie le Père. Je T'ai glorifié sur la terre, déclare le Christ. À juste titre ajouta-t-Il : sur la terre, car le Père était déjà glorifié dans les cieux et adoré par les anges, tandis que la terre était encore dans l’ignorance. Ayant proclamé à tous le Père, le Fils déclare maintenant : «Je T'ai glorifié partout sur la terre en communiquant la connaissance de Dieu, et J’ai achevé l'œuvre que Tu M'as donnée». L'œuvre du Fils seul-engendré incarné est : de sanctifier notre nature ; de renverser le prince de ce monde, qui se faisait prendre pour Dieu, et de planter la connaissance de Dieu dans la création. Mais comment a-t-Il achevé cette œuvre, alors qu’elle fut à peine commencé ? «J’ai achevé ce qui est ma part de faire», explique-t-Il. En effet, le Christ a déjà accompli la majeure part en implantant en nous la racine de tout bien, en vainquant le diable, et en Se jetant dans la gueule dévorant tout de la bête de la mort. De cette «racine» suivraient nécessairement tous les fruits de la connaissance de Dieu. C’est en ce sens qu’Il a achevé l'œuvre. «J’ai semé, J’ai planté la racine : les fruits suivront sûrement. Ô Père, glorifie-Moi auprès de Toi-même de la gloire que J'avais auprès de Toi avant que le monde fût formé.» À ce moment, la nature de la chair n’avait pas encore été glorifiée : elle n’avait pas été rendue digne de l’incorruption ni du partage du trône royal. C’est pourquoi le Seigneur déclare : Glorifie-Moi, voulant dire : «Reçois ma Nature humaine déshonorée et crucifiée, et élève-la à la Gloire que Moi – le Fils et Verbe de Dieu – J'avais auprès de Toi avant que le monde fût.» Après son Ascension, le Christ, en notre nature humaine, fut assis sur le trône royal, et maintenant Il est adoré par toute la création.

Ensuite, Jésus explique ses Paroles : Je T'ai glorifié sur la terre, comme voulant dire : J'ai fait connaître ton Nom. Comment se fait-il que le Fils fut le premier à faire connaître le Nom de Dieu, alors que Isaïe dit : ils… jureront par le Dieu de vérité (Is 65,16) ? Comme nous l’avons souvent souligné, le Nom de Dieu a déjà été révélé, mais seulement aux Juifs, et pas au monde entier. Maintenant, le Christ annonce que le Nom de Dieu sera aussi révélé aux Gentils, puisqu’Il a détruit le diable, le maître de l’idolâtrie et a planté les graines de la connaissance divine. Si à ce moment, les païens avaient déjà une certaine connaissance de Dieu, c’était seulement en tant que Créateur-démiurge, mais non en tant que Père. Ce qui plus est, par ses propres Paroles et Œuvres, le Christ a non seulement révélé son Père, mais S’est révélé Lui-même. 

6-8. J’ai fait connaître ton Nom aux hommes que Tu M’as donnés du milieu du monde. Ils étaient à Toi, et Tu Me les as donnés ; et ils ont gardé ta Parole. Maintenant ils ont connu que tout ce que Tu M’as donné vient de Toi. Car Je leur ai donné les Paroles que Tu M’as données; et ils les ont reçues, et ils ont vraiment connu que Je suis sorti de Toi, et ils ont cru que Tu M’as envoyé.

En disant : les hommes que Tu M’as donnés, le Seigneur exprime deux choses :  premièrement qu’Il n’est pas opposé au Père – «Je ne T’ai pas arraché ces hommes» ; et deuxièmement que c’est la Volonté du Père que les disciples croient au Fils – «Tu trouves ton plaisir à ce qu’ils sont venus à Moi. Entre nous, il n’y a pas de rivalité, seulement amour et unité d’esprit. Et ils ont gardé ta Parole en croyant en Moi et en n’écoutant pas les Juifs». Celui qui croit au Christ «garde la Parole de Dieu» – l’Écriture et la Loi – car l’Écriture proclame le Christ, et tout ce que le Seigneur a dit à ses disciples venait du Père. Comme Jésus a dit à ses disciples auparavant dans son discours : Les paroles que Je vous dis, Je ne les dis pas de Moi-même (Jn 14,10). Il les a instruits aussi : Demeurez en Moi (Jn 15,4), et ils demeuraient en Lui en effet et gardaient la Parole du Père.

Maintenant ils ont connu que tout ce que Tu M’as donné vient de Toi. Cela veut dire : «Maintenant mes disciples ont connu que (dans ma Nature divine) Je n’ai rien à Moi en propre et que Je ne suis pas différent de Toi. Rien de tout ce que Tu M’as donné n’a été donné par Grâce, comme le sont les Dons divins dispensés aux êtres créés. Ils sont de Toi,» ce qui veut dire : «Ils ne sont pas quelque chose que J’ai acquis, mais qui M’appartient par nature ; ils M’appartiennent comme au Fils qui a pleine autorité sur la propriété de son Père». On pourrait demander : «Comment les disciples ont-ils connu cela ?» Le Seigneur fournit la réponse : Je leur ai donné les Paroles que Tu M’as données, ce qui veut dire : «Ils connaissent cela par mes Paroles et Enseignement.» Le Christ leur enseignait sans cesse : «Tout ce que J’ai est du Père ; Je suis sorti de Toi ; et Tu M’as envoyé.» Tout au long de l’évangile, le Seigneur affirme qu’Il n’est pas un adversaire de Dieu, car Il fait la Volonté du Père.

9-10. C'est pour eux que Je prie. Je ne prie pas pour le monde, mais pour ceux que Tu M'as donnés, parce qu'ils sont à Toi ; et tout ce qui est à Moi est à Toi, et ce qui est à Toi est à Moi ; et Je suis glorifié en eux.

Pour bien mettre au clair que tout ce qu’Il disait au Père est purement pour le bien de ses disciples, le Seigneur y ajoute ensuite : «Je prie pour eux, et non pas pour le monde. J’aime et Je prends soin de mes disciples ; Je leur dispense ce qui est à Moi ; Je Te supplie, Père, de les protéger. Je ne Te prie pas au nom de gens grossiers, vulgaires, qui ne pensent à rien d’autre que ce monde ; Je prie … pour ceux que Tu M'as donnés, parce qu'ils sont à Toi.» Quand le Seigneur dit : ceux que Tu M'as donnés, cela ne veut pas dire que le Père Lui a donné autorité tout récemment sur ces hommes. Cela ne veut pas dire qu’il fût un temps où le Père possédait cette autorité, mais pas le Fils, ni que le Père perdît cette autorité quand le Fils l’obtint. Pour expliquer cela, le Seigneur déclare : «Tout le Mien est Tien, et le Tien est Mien. Car tant qu’ils sont Tiens, ils sont Miens, car tout le Tien est Mien. Ils ne sont pas entrés dans ma possession il y a un moment. Et le fait qu’ils sont Miens ne veut pas dire du tout qu’ils ne sont plus Tiens. Ils ne T’ont pas été enlevés, car tout le Mien est Tien. De plus, Je suis glorifié en eux, ce qui signifie : «Je partage la Gloire de mon Père, exactement comme le fils d’un empereur partage l’autorité et la gloire de son père : tous les deux sont également honorés par leurs sujets.» Si le Fils était moindre que le Père, Il n’oserait pas dire : tout le Tien est Mien. Le Maître possède tout ce qu’a le serviteur, alors que le serviteur n’a rien de ce qui est à son maître. Ici, au contraire, ce qu’a le Père appartient au Fils, et ce qu’a le Fils appartient au Père. Ainsi, le Fils est glorifié en tout ce qui appartient au Père, car l’autorité du Fils sur toute la création est égale à celle du Père.

11-12. Je ne suis plus dans le monde, et ils sont dans le monde, et Je vais à Toi. Père saint, garde en ton Nom ceux que Tu M'as donnés, afin qu'ils soient un comme Nous. Lorsque J'étais avec eux dans le monde, Je les gardais en ton Nom. 

Pourquoi Jésus répète-t-Il : Je ne suis plus dans le monde, et Lorsque J'étais avec eux dans le monde ? À première vue, ces énoncés semblent contredire les promesses qu’Il avait faites : Et voici, Je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la fin du monde (Mt 28,20), et Vous Me verrez (Jn 16,16). La vérité est qu’Il dit à ses disciples seulement autant qu’ils sont capables de comprendre au moment précis. Comme il était vraisemblable qu’ils seraient désemparés à rester sans son Secours, le Christ déclare qu’Il les a confiés aux Soins et à la Protection de son Père. (Pour le bien des disciples), Il dit au Père : «Puisque Tu M’appelles à Toi, Tu dois les garder par ton propre Nom», ce qui veut dire : «par le Secours et le Pouvoir que Tu M’as donnés». Quelle sorte de protection le Père donne-t-Il ? Il dispense l’unité, afin qu’ils soient un. «S’ils préservent l’amour les uns pour les autres et ne se divisent pas en factions, ils seront invincibles.» Bien sûr, le Christ ne veut pas dire qu’ils doivent devenir littéralement une personne. Il veut dire qu’ils doivent imiter le Père et le Fils par l’acquisition de l’unanimité de pensée et de volonté entre eux. Parce que les disciples auraient trouvé impossible de Le croire s’Il avait dit : «Même si Je ne suis plus avec vous, Je vous protégerai cependant», Jésus les rassure en demandant au Père d’être leur Protecteur. En suppliant le Père, en apparence, de leur part, Il leur donne de l’espoir. Dans la même veine, quand le Christ dit : Je les gardais en ton Nom, Il ne veut pas dire qu’Il les gardait saufs seulement par le pouvoir du Nom du Père. Il parle de cette façon – comme nous l’avons expliqué bon nombre de fois – en raison de la faiblesse de ses auditeurs, qui ne pouvaient pas saisir encore qu’Il était Dieu. Ce faisant, le Seigneur les fortifie et les rassure : «Tant que J’étais avec vous, vous étiez protégés et gardés par le pouvoir du Nom du Père. Maintenant vous devez croire qu’Il continuera à vous garder, car c’est sa Nature que de le faire».

12-13. J'ai gardé ceux que Tu M'as donnés, et aucun d'eux ne s'est perdu, sinon le fils de perdition, afin que l'Écriture fût accomplie. Et maintenant Je vais à Toi, et Je dis ces choses dans le monde, afin qu'ils aient en eux ma Joie parfaite.


J'ai gardé ceux que Tu M'as donnés : ces paroles traduisent une profonde humilité, si on les comprend correctement. D’un bout à l’autre de ce chapitre, il pourrait sembler que Jésus enjoint au Père de garder les disciples après son départ,  comme un homme qui donne à son ami une somme d’argent à garder et lui dit : «Regarde, je n’en ai rien perdu : toi non plus, tu ne dois pas en perdre.». Mais en réalité, le Seigneur console ses disciples : «Je dis ces choses dans le monde pour rassurer mes disciples et leur donner de la joie. Sachant que Tu les as reçus saufs et les garderas – exactement comme Je l’ai fait, sans en perdre aucun – ils peuvent, à nouveau, respirer librement.» Comment le Seigneur peut-Il prétendre n’en avoir perdu aucun, alors que Judas s’éloigna, et que beaucoup d’autres de ses adeptes L’ont quitté aussi (v. Jn 6,66). «Autant que cela dépendait de Moi», explique-t-Il, «Je n’en ai perdu aucun. J’ai tout fait, en ce qui Me concerne, pour les garder, et les ai gardés jalousement. Si certains ont choisi de Me rejeter, ce n’est pas de ma faute». Afin que (ἵνα) l’Écriture fût accomplie, c’est-à-dire toute Écriture qui se réfère au fils de perdition. Car il est mentionné à plusieurs endroits dans les Psaumes et dans d’autres livres prophétiques. Comme nous l’avons expliqué plus tôt, la conjonction ἵνα (afin que) est couramment utilisée dans l’Écriture pour exprimer l’issue d’un événement. 

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