dimanche 27 avril 2014

2e Dimanche de Pâques (Antipâques)

2e Dimanche de Pâques (Antipâques)
Dimanche de Thomas
Jean 20,19-31
De l'Explication de l'évangile de saint Jean
par le bienheureux Théophylacte, archevêque d'Ochrid et de Bulgarie

19-23. Le soir de ce jour, qui était le premier de la semaine, les portes du lieu où se trouvaient les disciples étant fermées, à cause de la crainte qu'ils avaient des Juifs, Jésus vint, Se présenta au milieu d'eux, et leur dit : La paix soit avec vous ! Et quand Il eut dit cela, Il leur montra ses Mains et son Côté. Les disciples furent dans la joie en voyant le Seigneur. Jésus leur dit de nouveau : La paix soit avec vous ! Comme le Père M'a envoyé, Moi aussi Je vous envoie. Après ces paroles, Il souffla sur eux, et leur dit : Recevez le saint Esprit. Ceux à qui vous pardonnerez les péchés, ils leur seront pardonnés ; et ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus.

Lorsque Marie Madeleine apporta ses nouvelles aux disciples, il est fort possible qu’ils aient réagi de l’une de ces deux façons : soit ils ne l’ont pas crue du tout, soit, s’ils l’ont crue, ils étaient déconfits, parce qu’ils n’étaient pas jugés dignes de voir le Christ. En attendant, la crainte des Juifs augmentait le désir des disciples de voir le Seul qui pouvait soulager leur anxiété. Ainsi donc, le Seigneur leur apparut le soir même, lorsqu’ils étaient tous ensemble rassemblés. Il est écrit qu’Il apparut, les portes étant fermées, ce qui veut dire qu’Il entra par les portes fermées. C’était pour montrer qu’Il était ressuscité de la même manière alors que l’entrée du tombeau était fermée par une pierre. On penserait qu’ils auraient pu Le prendre pour un fantôme, mais le témoignage de Marie Madeleine avait grandement fortifié leur foi. Aussi, Il Se manifesta de façon à calmer leurs pensées agitées : La paix soit avec vous ! – dit-Il doucement, signifiant : «N’ayez pas peur». C’était pour leur rappeler ce qu’Il leur avait dit avant la crucifixion : Je vous donne ma Paix. (Jn 14,27) Alors les disciples étaient joyeux quand ils virent le Seigneur. Cela aussi, Il l’avait prédit avant sa Mort : Je vous reverrai et votre cœur se réjouira. (Jn 16,22) Il était bon qu’Il leur dise de nouveau : Paix, parce que les disciples étaient maintenant engagés dans un combat désespéré avec les Juifs. Comme Il avait dit : Réjouissez-vous ! aux femmes (Mt 28,9), parce que la tristesse était leur lot, Il accorde de même la paix aux disciples, qui étaient maintenant, et le seront toujours, en guerre avec les Juifs.

Il convient qu’Il accorde de la joie aux femmes, condamnées qu’elles sont à porter des enfants dans la douleur et la souffrance ; et de la paix aux hommes, en raison de la guerre qui va les engloutir pour leur prédication de l’évangile. En même temps, Il révèle que la croix a inauguré la paix : «La croix a apporté la paix… maintenant Je vous envoie pour la proclamer.» Pour fortifier et encourager les disciples, Il déclare : «Comme mon Père M’a envoyé, Je vous envoie aussi. C’est mon Travail que vous avez entrepris de faire, faites-le donc avec courage ; Je serai avec vous.» Voyez l’autorité de son Ordre : «C’est Moi qui vous envoie (̓Εγὼ πέμπω ὑμᾶς).» Il ne condescend plus aux limitations de leur entendement, en disant, comme Il l’a souvent fait avant la Résurrection : «Je demanderai à mon Père, et Il vous enverra.» Maintenant, Il souffle sur eux et leur donne le saint Esprit — mais non le Don entier, qu’Il impartira à la Pentecôte. Recevez le saint Esprit veut dire : «Que ce Don partiel de Grâce vous rende prêts à recevoir plus tard la Plénitude du saint Esprit.» Les mots : Ceux à qui vous pardonnerez les péchés, ils leur seront pardonnés indiquent le Don particulier qu’Il accorde maintenant aux disciples, le pouvoir de pardonner les péchés. Plus tard, à la Pentecôte, le saint Esprit Lui-même descendra en toute sa Puissance, prodiguant aux apôtres tout don et pouvoir spirituels pour accomplir des œuvres merveilleuses, comme ressusciter les morts.

Il vaut la peine de considérer pourquoi Jean note seulement que le Christ a apparu à ses disciples à Jérusalem, alors que Matthieu et Marc disent qu’Il leur promit de leur apparaître en Galilée (v. Mt 26,32, Mc 14,28). Quelques-uns l’ont expliqué de cette façon : «Le Christ n’a jamais dit qu’Il apparaîtrait aux disciples seulement en Galilée et pas à Jérusalem. À Jérusalem, Il apparut aux douze, alors qu’en Galilée Il apparut à tous ses disciples, en accord avec sa Promesse. Le fait qu’Il Se montra plusieurs fois aux douze indique qu’Il les honorait davantage que les autres.» Cela nous montre encore une fois qu’il n’y a pas de désaccords irréconciliables entre les récits des évangélistes. Il y eut beaucoup d’apparitions du Seigneur après sa Résurrection, et chaque évangéliste choisit certaines d’entre elles à consigner. Lorsque deux évangélistes décrivent le même événement, le second raconte en général ce que le premier a omis. Et maintenant, ô lecteur, réfléchis sur le rang divin de la prêtrise. Le pouvoir de pardonner les péchés est un pouvoir divin ; partant, nous devons montrer du respect aux prêtres comme à Dieu. Même s’ils sont indignes, ils sont cependant ministres des Dons divins, et la Grâce leur donne de la force (ἐνεργεῖ διʹαὐτῶν), exactement comme elle en a donné à l’âne de Balaam, le rendant capable de parler (v. Nb 22,28-30). La fragilité humaine n’empêche pas la Grâce d’œuvrer. Par conséquent, puisque la Grâce est accordée par l’intermédiaire des prêtres, honorons-les.

24-29. Thomas, appelé Didyme, l’un des douze, n’était pas avec eux lorsque Jésus vint. Les autres disciples lui dirent donc : Nous avons vu le Seigneur. Mais il leur dit : Si je ne vois dans ses Mains la marque des clous, et si je ne mets mon doigt dans la marque des clous, et si je ne mets ma main dans son Côté, je ne croirai point. Huit jours après, les disciples de Jésus étaient de nouveau dans la maison, et Thomas se trouvait avec eux. Jésus vint, les portes étant fermées, Se présenta au milieu d’eux, et dit : La paix soit avec vous ! Puis Il dit à Thomas : Avance ici ton doigt, et regarde mes Mains ; avance aussi ta main, et mets-la dans mon Côté ; et ne sois pas incrédule, mais crois. Thomas Lui répondit : Mon Seigneur et mon Dieu ! Jésus lui dit : Parce que tu M’as vu, tu as cru. Heureux ceux qui n’ont pas vu, et qui ont cru ! 

Thomas… n’était pas avec les disciples, peut-être parce qu’il n’était pas encore retourné de là où il se cachait après que les disciples s’étaient dispersés. Ailleurs, nous avons appris que le nom hébreu «Céphas» veut dire «Rocher» (Πέτρος, v. Jn 1. 42) ; ici, on nous dit que «Thomas» signifie «Jumeau» (Δίδυμος). L’évangéliste note ici le sens du nom pour indiquer que Thomas était enclin à être de deux avis — porté au doute, par nature. Il doutait des nouvelles que les autres lui avaient apportées, non parce qu’il les croyait menteurs, mais parce qu’il considérait impossible qu’un homme ressuscite des morts. Et son doute le rendait extrêmement curieux. La crédulité est un signe d’étourderie ; mais une résistance obstinée à la Vérité est une indication sûre d’un esprit borné. Thomas ne voulait même pas croire à ses yeux, mais exigeait une preuve par le toucher, le moins subtil des sens : si je n’… enfonce ma main dans son Côté. Comment Thomas savait-il qu’il y avait des plaies dans les Mains et le Côté du Christ ? Parce que les autres disciples le lui avaient dit. Et pourquoi le Seigneur attend huit jours avant de lui apparaître ? Pour laisser le temps à chacun de ses condisciples de lui dire ce qu’ils avaient vu. Entendre la même histoire de chacun individuellement le rendait plus apte à croire et augmentait son désir de voir le Seigneur. Pour montrer qu’Il était invisiblement présent huit jours plus tôt lorsque Thomas exprima son incrédulité, le Seigneur n’attend pas que Thomas prenne la parole. Au lieu de cela, Il lui propose tout de suite exactement ce que Thomas désirait, citant ses propres paroles.

D’abord, Il réprimande Thomas, en disant : Avance ici ta main, puis, Il l’admoneste : et ne sois pas incrédule, mais crois. Il est clair d’après cela que la cause du doute de Thomas était le manque de foi, et non pas qu’il était très soucieux de vérifier les faits (comme le disent certains : désireux de les voir sous un meilleur éclairage). Mais dès que Thomas eut touché le Côté du Seigneur, il se révéla un superbe théologien, proclamant les deux Natures et l’unique Hypostase du seul Christ. Thomas se réfère à la Nature humaine du Christ en L’appelant Seigneur ; car le terme «Seigneur» (Κύριος) ne s’applique pas seulement à Dieu, mais aussi à des hommes. (Pensant que Jésus était le jardinier, Marie Madeleine Lui avait dit : «Seigneur (Κύριε), si c'est toi qui L'as emporté… (v. Jn 20,15). Mais quand Thomas s’écrie : …et mon Dieu, il confesse l’Essence divine du Christ, et affirme que les noms Seigneur et Dieu se réfèrent à une seule et même Personne. En déclarant : Heureux ceux qui n’ont pas vu, et qui ont cru !, le Seigneur nous enseigne que la foi signifie l’acceptation des choses non vues. Il Se réfère en premier lieu aux disciples qui avaient cru sans toucher son Côté ou la marque des clous, et en second lieu à ceux qui croiront plus tard (sans aucune confirmation physique). Il ne prive pas Thomas de sa part de béatitude, mais encourage tous ceux qui n’ont pas vu. Il y avait un adage : «Heureux sont les yeux qui ont vu le Seigneur». Le Christ, cependant, loue ceux qui vont croire sans voir, les déclarant vraiment heureux.

Une question se pose : comment un corps incorruptible peut-il montrer les marques de clous et être touché de mains humaines ? La réponse est que telles choses sont possibles en tant que faits de l’économie divine : elles sont les manifestations de la Condescendance de Dieu et son Amour de l’homme. En entrant dans la chambre, les portes étant fermées, le Christ fait comprendre tout à fait clairement qu’après la résurrection, son Corps n’est plus le même : il est maintenant léger et subtil, libre de toute grossièreté matérielle. Mais pour confirmer que c’est vraiment leur Seigneur et Maître qui leur a apparu, Il permet que son Corps ressuscité, portant les plaies de la crucifixion, soit touché. Pour la même raison, quand Il marchait sur l’eau avant la Passion (v. Mc 6,48), son Corps était inchangé par rapport à celui qui marchait sur la terre ferme, et cela rassurait les disciples. Mais bien qu’Il permette que l’on touche son Corps ressuscité, il est maintenant impassible et incorruptible. Quand le Christ mange maintenant avec ses disciples, ce n’est plus pour satisfaire un besoin physique de son Corps (car il n’y en avait plus): La nourriture qui entre dans la bouche va dans le ventre, puis est jeté dans les lieux secrets (v. Mt 15,17). Mais cela n’en était pas ainsi pour le Christ après la résurrection. La nourriture qu’Il mangeait pendant ce temps était consumée par un pouvoir divin invisible. Sa seule raison de manger était de confirmer la réalité de sa Résurrection, et Il permit à son Corps incorruptible de porter la marque des clous et d’être touché, pour la même raison. Vois-tu, ô lecteur, comment, pour sauver une âme sceptique, le Seigneur n’épargnait pas sa propre Dignité, mais condescendit à dénuder son Côté ? Nous non plus, nous ne devons pas mépriser le moindre de nos frères.

30-31. Jésus a fait encore, en présence de ses disciples, beaucoup d'autres miracles, qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ces choses ont été écrites afin que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie en son Nom.

À quels autres miracles l’évangéliste se réfère-t-il ? À ceux que Jésus a fait après sa Résurrection, et non ceux d’avant sa Crucifixion, comme on le supposerait. L’évangéliste parle de miracles que Jésus fit en présence de ses disciples seulement. Les miracles avant la Passion furent opérés devant la multitude, et révélèrent Jésus à tous comme Fils de Dieu. Les miracles après la résurrection furent opérés quand Il était seul avec ses disciples pendant les quarante jours : leur but était de les convaincre qu’Il était toujours le Fils de l’homme, avec un corps humain, bien que maintenant incorruptible, plus ressemblant à Dieu et n’étant plus sujet aux lois de la chair. Des nombreux miracles après la résurrection, ceux-ci seuls sont écrits. Ils ne sont pas décrits de façon ostentatoire, pour vanter la Gloire du Seul-Engendré, mais simplement, comme dit l’évangéliste — afin que vous croyiez. Donc quel est ici le bénéfice et à qui profite-t-il ? Certainement pas au Christ, car que gagne-t-Il par notre foi ? C’est nous qui gagnons. L’évangéliste lui-même nous dit qu’il écrit afin qu'en croyant vous ayez la vie par le Nom de Jésus. Quand nous croyons que Jésus est ressuscité des morts et vit, nous gagnons pour nous-mêmes la vie éternelle. Il est ressuscité et est vivant, pour notre bien. Mais quiconque imagine que le Christ est mort, et ne S’est pas levé du tombeau n’a pas la vie en lui. En effet, en pensant ainsi, il confirme et assure sa propre mort éternelle et sa corruption.


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