samedi 7 septembre 2013

HOMÉLIE SUR LE 11e DIMANCHE DE MATTHIEU



«Le Seigneur dit cette parabole : Le royaume des cieux est semblable à un roi qui voulut régler ses comptes avec ses serviteurs. L'opération commencée, on lui amena un homme qui lui devait dix mille talents. Comme il n’avait pas de quoi payer, son maître ordonna qu’on le vendît, lui, sa femme, ses enfants et tout ce qu'il avait, pour acquitter sa dette. Le serviteur, se jetant à ses pieds, le conjurait en disant : Seigneur, aie patience envers moi et je te paierai tout. Touché de compassion, le maître de ce serviteur le relâcha et lui fit remise de sa dette. Le serviteur, à peine sorti, rencontra un de ses compagnons, qui lui devait cent deniers. Le saisissant à la gorge, il l'étouffait en disant : Paie ce que tu dois ! Son compagnon, se jetant à ses pieds, le conjurait en disant : Aie patience envers moi et je te paierai tout. Mais lui, sans vouloir l'entendre, s'en alla et le fit mettre en prison jusqu'à ce qu'il payât ce qu'il devait. Voyant cela, les autres serviteurs en furent tout contristés, et ils vinrent raconter à leur maître ce qui s'était passé. Alors le maître l'appela et lui dit : Serviteur méchant, je t'avais remis toute ta dette, parce que tu m'en avais supplié. Ne devais-tu pas avoir pitié de ton compagnon, comme j'ai eu pitié de toi ? Et son maître irrité le livra aux exécuteurs, jusqu'à ce qu'il eût payé tout ce qu'il devait. Ainsi vous traitera mon Père céleste, si chacun de vous ne pardonne à son frère du fond de son cœur.» (Matthieu 18,23-35)

«Le royaume des cieux est semblable». Semblable ne veut pas dire égal, car il reste toujours des différences entre la parabole et la réalité visée, – le Royaume de Dieu. Le Seigneur se sert souvent des paraboles car «afin de graver plus facilement dans l’esprit des auditeurs, à l’aide de comparaisons et d’exemples, le précepte qu’ils ne pourraient retenir s’il était présenté dans sa simplicité.» (Saint Jérôme)
Ce roi du parabole est l’image du Seigneur, le Roi des rois. Les royaumes terrestres ne sont qu’un pâle reflet de son Royaume qu’il a «promis à ceux qui l’aiment.» (Jac 2,5)
Ce roi voulut «régler ses comptes avec ses serviteurs». Ces serviteurs ne sont rien d’autres que nous, les pauvres pécheurs, qui manquons sans cesse à nos devoirs et qui dilapidons nos talents qui nous sont octroyés afin de le fructifier, comme un autre parabole indique bien. Nous sommes libres dans cette vie, de faire avec ce que Dieu nous a donné – notre corps et notre âme, la nature – mais cela ne reste pas sans conséquence, si nous transgressons les lois qu’Il nous a donné pour notre bien.
Un de ces dons c’est la miséricorde et l’amour du prochain qui sont visées dans ce parabole. Si nous ne nous servons pas de ces grâces et n’ayons que mépris, dureté et indifférence envers le prochain, le prix en sera bien cher car le Seigneur nous traitera de même dès cette vie et éternellement dans l’autre. 
Offenser un roi est mille fois plus grave que offenser un compagnons, un co-serviteur c’est-à-dire notre prochain, c’est pour cela la différence des sommes de la parabole : dix mille talents et cent deniers. Dans d’autres termes, les péchés que nous commettons envers Dieu et le tort que le prochain nous a fait sont sans comparaison.
La parabole gravit autour du pardon. Il nous est demandé de pardonner, non seulement des lèvres mais «du fond de son cœur.»
«Voyez l’excès de l’amour de Dieu : le serviteur demande un simple délai; son maître lui accorde bien plus qu’il ne demande : il lui fait remise entière et absolue de tout ce qu’il lui devait.» Saint Jean Chrysostome. (hom. 61) «Soyez miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux,» dit l’évangile (Lc 6,36)
Est-ce que nous aurons jamais la possibilité de rendre ce que Dieu nous a donné ? Bien moins encore que ce serviteur ingrate. Si pourtant nous pardonnons «aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera aussi.» (Mt 6,14) Donc rien de plus facile que de régler nos dettes : pardonnons et il nous sera pardonné. C’est cela le principal message de ce dimanche.
Nous exigeons un compte exacte du prochain. Où est la compassion, l’indulgence et la générosité ? N’existent-t-il pas mille circonstances atténuantes à invoquer : fatigue, malentendu, chagrin, souffrance etc. Nous de notre côté, nous voulons toujours que Dieu et le prochain nous pardonnent. 
Quoi dire de plus sur cette parabole dont le message est si simple et sans équivoque ? Il n’y a pas «oui mais.» Notre liberté est sans entraves pour pardonner.

Archimandrite Cassien

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