dimanche 22 septembre 2013

ÉMU DE COMPASSION



   Pour ne pas enfouir mon talent, je me force de le faire fructifier, en écrivant quelques lignes,  pour ne pas entendre un jour le Maître me dire : «méchant serviteur …» (Lc 19,22)
   J'ai pensé plusieurs fois, ces jours-ci, au passage de l’évangile du bon Samaritain, où il est dit : «…fut ému de compassion.» (Lc 10,33) Qu’est-ce à dire : être ému de compassion ? Pourquoi le prêtre et le lévite ne furent-ils pas émus également ? Qu’est-ce que la compassion ? Autant de questions auxquelles il faudra répondre.
   Le mot compassion, compatir, compatissant  veut bien dire souffrir avec, faire sien les souffrances d’autrui. Le contraire de la compassion c’est un coeur dur et insensible qui ne s’intéresse que par curiosité aux souffrance du prochain qui succombe sur le chemin de la vie. C’est donc un sentiment, la compassion, qui est inhérent à notre nature, et non surajouté, mais que le péché a estropié, étouffé.
   Evidemment nous ne pouvons pas soulager toute la souffrance du monde, mais presser le pas, comme ce prêtre et lévite qui allaient probablement accomplir leur service au Temple, c’est mettre le secondaire à la place de l'essentiel. Ne serons-nous pas jugés sur la compassion que nous avons eu avec le prochain qui a eu faim et soif, qui était nu, malade, en prison ?
   Le Christ «voyant la foule, ... fut ému de compassion pour elle, parce qu’elle était languissante et abattue, comme des brebis qui n’ont point de berger.» (Mt 9,36). Plusieurs fois l’évangile dit du Christ qu’il fut «ému de compassion» (Mt 14,14; 15,32; 20,34; Mc 1,41; 9,22; Lc 7,13 etc)
   Du père du fils prodigue il est dit également : «Comme il (le fils) était encore loin, son père le vit et fut ému de compassion, il courut se jeter à son cou et le baisa.» Le père aurait pu lui faire des reproches pour avoir dissipé l’héritage et aurait pu agir comme le fils ainé, qui ne pensait qu’au matériel. Pourtant un coeur plein de compassion ne raisonne pas ainsi et essaie de couvrir les faiblesse d’autrui, songeant à ses propres faiblesses.
   Être ému (de compassion) suppose un coeur sensible (non sentimental) qui compatit même avec la souffrance des animaux, comme on voit souvent dans la vie des saints. Rester indifférent, c’est le signe d’un coeur égoïste qui est replié sur lui-même. Être juste curieux devant la souffrance en face, revient au même.
   Je sais, par expérience, que ce n’est pas facile de remplacer cette dureté de notre coeur par la compassion. C’est une tâche pour toute notre vie, et ces mots «être ému de compassion», gravitent autour de l’essentiel et si nous ne réussissons pas, cela veut dire que nous manquons l’essentiel dans la vie.
   La compassion peut s’exprimer de différentes manières : une aide matériel, une bonne parole, une prière. Si nous ne pouvons pas aider matériellement, si une parole est difficile, une prière est toujours possible en face de la souffrance et Celui que nous prions, «le Seigneur plein de miséricorde et de compassion,» (Jac 5,11) et dont les moyens sont inépuisables, saura intervenir.

Archimandrite Cassien

«En venant sur la terre, le Seigneur s’est fait notre prochain par la sincère compassion qu’il nous porte, et notre voisin par la miséricorde dont il nous comble.» saint Ambroise de Milan

Aucun commentaire: