samedi 29 mai 2021

HOMÉLIE POUR LE DIMANCHE DE LA SAMARITAINE

 Cet évangile, que nous entendons chaque année, à la même époque, fut maintes fois commenté et expliqué. Moi-même je l’avais déjà fait dans le bulletin n° 142. Sans vouloir répéter ce que j’ai déjà écrit, ni plagier d’autres, allons méditer sur cet épisode qui est un trésor inépuisable, comme tout l’évangile.

Seul l’évangéliste Jean en parle, ayant écrit son évangile en dernier afin de compléter les évangélistes synoptiques, c’est-à-dire ceux de Matthieu, Marc et Luc (Synoptique veut dire : ayant les mêmes regards sur un événement, tout en s’exprimant chacun à sa manière).

«Il quitta la Judée, et retourna en Galilée. Comme il fallait qu’il passât par la Samarie,» dit l’évangile. (Jn 4,3-4) Le chemin pour aller de Judée en Galilée passait inévitablement par la Samarie. Pendant les trois ans de son ministère, Jésus parcourut sans cesse ces deux contrées pour évangéliser les juifs. Sa mission n’était pas de prêcher aux non-juifs, ce qui était réservé à ses disciples. «Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël,» disait-t-il. (Mt 15,24) Ce n’était qu’exceptionnellement qu’il prêchait aux autres ou les guérissait.

Là, au puits de Jacob, – lieu historique qui remontait au patriarche Jacob – il s’assit fatigué du chemin parcouru et de la chaleur du midi. «C’était environ la sixième heure,» donc vers midi. En tant qu’homme, Jésus avait faim et soif et se fatiguait.

Une femme samaritaine vient alors puiser de l’eau – tâche réservée aux femmes et aux enfants. Les hommes ne le faisaient qu’exceptionnellement comme on le voit ailleurs dans l’évangile : «Vous rencontrerez un homme portant une cruche d’eau.» (Mt 14,13 et Luc 22,10) Si cela avait été une tâche commune aux hommes, les disciples auraient rencontré d’autres hommes portant de l’eau, mais alors lequel aurait été le bon indiqué par le Christ ?

Ce n’était pourtant pas tellement la soif qui incita le Messie à demander de l’eau, – c’était plutôt un prétexte – mais l’intention de sauver cette femme pécheresse. Elle avait eu cinq maris, ce qui était toléré par la Loi de Moïse, mais le sixième n’était pas son mari, car considéré comme une transgression de la Loi.   

Il parla donc à cette femme bien que les juifs n’avaient pas de relations avec les samaritains, les considérant comme hérétiques. Pour les purs, pourtant, tout est pur, comme dit l’Écriture : «Tout est pur pour ceux qui sont purs; mais rien n’est pur pour ceux qui sont souillés et incrédules.» (Tite 1,15) Les disciples, encore imparfaits, s’étonnèrent de le voir parler à une femme (samaritaine). «Ils étaient surpris de le voir parler à une femme.»

Quand le Christ lui révéla ce qui était caché, ses yeux spirituels s’ouvrirent, ne songeant auparavant qu’à des choses terre à terre : Comment peut-t-il parler à elle, une samaritaine ? Comment peut-il puiser de l’eau, n’ayant pas de cruche ? Comment peut-il donner une eau qui étanche la soif pour toujours etc. ? «Seigneur, je vois que tu es prophète,» dit-elle, et plus tard même, elle entrevit qu’il était le Messie que les samaritains attendaient aussi. «Ne serait-ce point le Christ ?» 

Est-ce que le Seigneur a bu finalement l’eau et mangé avec ses disciples ? L’évangile n’en dit rien. Des questions futiles qui ne servent à rien pour notre salut – juste à satisfaire notre curiosité. Le Christ parla de l’eau vive, qui étanche la soif pour toujours et qui jaillit dans la vie éternelle. Quelle est cette eau vive ? C’est cela qu’il est important de chercher à savoir, bien sûr pas seulement de savoir, mais d’en trouver et d’en boire. On sait abstraitement que c’est la grâce de l’Esprit saint qui vivifie, mais ayant tourné nos yeux vers le bas, comme cette samaritaine, on n’y songe que rarement et l’on s’en occupe peu. Que le Christ ouvre donc aussi nos yeux spirituels, et que nous devenions saint comme la samaritaine qui est devenue sainte Photinie.


a. Cassien




«Lorsque l'homme s'est désaltéré dans les jouissances charnelles, sa soif sera-t-elle apaisée pour toujours ? Il est donc vrai que celui qui boira de cette eau aura encore soif. Mais s'il boit de l'eau que je donne, il n'aura jamais soif; car comment ceux qui seront enivrés de l'abondance de la maison de Dieu (cf.Ps 35), pourraient-ils encore éprouver le besoin de la soif ? Ce que le Sauveur promettait donc à cette femme, c'était l'effusion surabondante de l'Esprit saint qui devait rassasier son âme.» 

(vénérable Augustin, traité 15)


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