samedi 10 mai 2014

4e Dimanche de Pâques

4e Dimanche de Pâques
Dimanche du Paralytique
Jean 5,1-15
De l'Explication de l'évangile de saint Jean
par le bienheureux Théophylacte, archevêque d'Ochrid et de Bulgarie

1-4. Après cela, il y eut une fête des Juifs, et Jésus monta à Jérusalem. Or, à Jérusalem, près de la Porte des Brebis, il y a une piscine qui s'appelle en hébreu Béthesda, et qui a cinq portiques. Sous ces portiques étaient couchés en grand nombre des malades, des aveugles, des boiteux, des paralytiques, qui attendaient le mouvement de l'eau ; car un ange descendait de temps en temps dans la piscine, et agitait l'eau ; et celui qui y descendait le premier après que l'eau avait été agitée était guéri, quelle que fût sa maladie.

C’était une fête des Juifs, la Pentecôte, je pense. Le Seigneur monta à cette fête pour deux raisons : premièrement, pour ne pas paraître opposé, par son Absence, à la Loi, mais être vu en train de la célébrer ensemble avec les autres. Deuxièmement, Il monta à la fête pour attirer davantage de monde à Lui-même par ses signes et son enseignement, surtout parmi la multitude candide. Car les fermiers et les artisans, qui, les autres jours, étaient occupés à leur travail, se réunissaient toujours ensemble les jours de fête. La piscine était appelé Piscine des Brebis, parce que les brebis destinées au sacrifice étaient rassemblées là, et après qu’elles ont été tuées, leurs boyaux étaient lavés dans son eau. La croyance commune était que, par le simple lavage des entrailles sacrificielles, l’eau obtient un pouvoir divin, et à cause de cela, un ange y venait à certains moments pour opérer un miracle. Ici, nous voyons la Providence divine guidant les Juifs, depuis le commencement, vers la foi en Christ, prévoyant pour eux ce miracle de la piscine. Dans ces croyances et pratiques judaïques, Dieu préfigurait le baptême, qui contiendra un grand pouvoir et les dons de purifier des péchés et d’amener des âmes à la vie. Il leur avait déjà donné de l’eau pour la purification des souillures, non pas de la souillure fondamentale, mais de celles qui apparurent comme telles avant (la Nouvelle Alliance), telles que la souillure d’avoir touché un cadavre, un lépreux, et ainsi de suite. Ensuite, Il leur donna ce miracle de la piscine, les préparant ainsi à recevoir le baptême. Un ange descendait à certains moments pour agiter l’eau, y infusant du pouvoir divin. En effet, ce n’est pas dans la nature de l’eau que de guérir d’elle-même (si cela était, elle guérirait chaque fois) ; c’est entièrement par l’activité de l’ange que le miracle se produisait. C’est pareil pour nous : l’eau du baptême est de l’eau toute simple, qui, par les invocations faites à Dieu, reçoit la Grâce de l’Esprit saint pour nous libérer de la maladie spirituelle. Et cette eau guérit tous : les aveugles dont les yeux spirituels sont obscurcis et incapables de discerner le meilleur du pire ; les boiteux qui ne peuvent ni marcher pour faire le bien, ni même avancer vers ce qui est meilleur ; les atrophiés, qui sont en un désespoir complet et n’ont part à rien de bon. Tous sont guéris par l’eau du baptême. Avant, notre faiblesse elle-même nous empêchait de guérir, mais maintenant il n’y a pas d’obstacle à ce que nous soyons baptisés. Dans les eaux de cette piscine, un seul était guéri chaque fois, alors que les autres restaient malades ; maintenant, même si le monde entier venait pour être baptisé à la fois, la Grâce ne diminuerait pas.

5-7. Là se trouvait un homme malade depuis trente-huit ans. Jésus, l'ayant vu couché, et sachant qu'il était malade depuis longtemps, lui dit : Veux-tu être guéri ? Le malade Lui répondit : Seigneur, je n'ai personne pour me jeter dans la piscine quand l'eau est agitée, et pendant que j'y vais, un autre descend avant moi.

La persévérance du paralytique est stupéfiant. Depuis trente-huit ans, il était couché là, espérant chaque jour être guéri, mais toujours empêché par ceux qui étaient plus forts. Cependant, il n’a jamais renoncé, ni n’a désespéré. C’est pourquoi le Seigneur le questionna, afin de nous montrer la constance de cet homme, et non pas, bien sûr, parce qu’Il ignorait la réponse. Non seulement il n’était pas nécessaire pour Lui d’obtenir la réponse, mais il aurait été insensé de la part de qui que ce soit de poser une telle question, de savoir si un homme malade voulait être guéri. Le Seigneur parlait ainsi uniquement pour porter à notre attention la patience de l’homme. Comment répond-il ? Avec gentillesse et douceur : «Oui, Seigneur, je souhaite être guéri, mais je n’ai personne capable de me porter jusque dans l’eau.» Il ne répond pas par le blasphème ; il ne réprimande pas le Christ pour poser une question stupide ; il ne maudit pas le jour de sa naissance, comme nous le faisons souvent, pusillanimes que nous sommes, lorsque nous subissons une affliction bien moindre que la sienne. Il répond humblement et d’un air implorant, ne sachant pas en effet à qui il parlait, et aussi désirant peut-être demander au Christ de le porter dans l’eau. Notez aussi que le Christ ne dit pas : «Veux-tu que Je te rende la santé ?», de peur de paraître Se vanter.

8-10. Lève-toi, lui dit Jésus, prends ton lit, et marche. Aussitôt cet homme fut guéri ; il prit son lit, et marcha. C'était un jour de sabbat. Les Juifs dirent donc à celui qui avait été guéri : C'est le sabbat ; il ne t'est pas permis d'emporter ton lit.

Il lui ordonne de prendre son lit afin de confirmer que le miracle n’était pas une illusion, car l’homme n’aurait pas été capable de porter son lit si ses membres n’avaient pas été soudés fermement et solidement ensemble. Le Seigneur n’exige pas de lui la foi avant de le guérir, comme il l’a fait avec beaucoup d’autres, car le paralytique ne L’avait jamais vu opérer de miracles. Et des autres de qui le Seigneur a exigé la foi, ce n’était pas avant, mais après avoir opéré des miracles en leur présence. Regardez comment le paralytique entendit et crut immédiatement l’Ordre du Seigneur. Il n’hésita pas et ne se dit pas : «N’est-Il pas fou de m’ordonner de me lever tout de suite ? Je suis là depuis trente-huit ans sans jamais avoir pu guérir, et maintenant soudain, je devrais me lever ?» Sans aucune pensée de cette sorte, il crut et se leva. Le Seigneur guérit le jour du sabbat, enseignant ainsi aux hommes une nouvelle compréhension de l’observation de la Loi, afin qu’ils ne pensent pas que c’est par le repos corporel qu’ils honorent le sabbat, mais par l’abstention du mal. Comment la Loi aurait-elle pu interdire de faire le bien le jour du sabbat, alors que la Loi vient de Dieu, qui fait le bien toujours. 
11-13. Il leur répondit : Celui qui m'a guéri m'a dit : Prends ton lit, et marche. Ils lui demandèrent : Qui est l'homme qui t'a dit : Prends ton lit, et marche ? Mais celui qui avait été guéri ne savait pas qui c'était ; car Jésus avait disparu de la foule qui était en ce lieu.

On doit s’émerveiller de l’audace de cet homme en face des Juifs. Alors qu’ils le harcelaient en disant : «il ne t'est pas permis d'emporter ton lit le jour du sabbat», il proclama avec audace son Bienfaiteur : Celui qui m'a guéri m'a dit : prends ton lit, et marche. C’est comme s’il avait dit : «C’est un non-sens que de m’interdire d’obéir à l’homme qui m’a sauvé d’une maladie aussi longue et dure». Les Juifs ne lui demandent pas : «Qui t’a rendu la santé ?», mais : Qui est l'homme qui t'a dit : prends ton lit, et marche ? C’est comme s’ils choisissaient d’être aveugles au bien, mais obsédés par ce qu’ils considéraient une transgression du sabbat. Jésus disparut pour que le témoignage de l’homme de sa guérison fût la preuve de la vérité, et non susceptible de l’accusation qu’il essayait de bien se faire voir de Jésus, en Lui attribuant le miracle. (Car non seulement l’homme ne savait pas qui était Jésus, mais) Jésus Lui-même n’était plus présent sur la scène. Jésus quitta ce lieu pour une autre raison aussi : pour éviter d’exciter davantage la colère des Juifs. Il savait que la seule vue de l’objet de l’envie suffit pour allumer la flamme de la méchanceté. Par conséquent, Il laisse les faits être examinés entièrement en eux-mêmes, d’après leurs propres mérites. Et plus les Juifs accusent, interrogent et examinent, plus rapidement se répand la parole du miracle.

14-16. Depuis, Jésus le trouva dans le Temple, et lui dit : Voici, tu as été guéri ; ne pèche plus, de peur qu'il ne t'arrive quelque chose de pire. Cet homme s'en alla, et annonça aux Juifs que c'était Jésus qui l'avait guéri. C'est pourquoi les Juifs poursuivaient Jésus, parce qu'Il faisait ces choses le jour du sabbat.

Les Paroles du Seigneur au paralytique : Voici, tu as été guéri ; ne pèche plus nous apprennent d’abord que la maladie dans l’homme découle du péché. Ensuite, elles nous apprennent que l’enseignement chrétien au sujet de l’enfer est vrai et que la punition y est éternelle. Où sont maintenant ceux qui disent : «J’ai forniqué une heure durant ; comment est-il possible que je sois puni pour l’éternité ?» Regardez cet homme, dont les années de péché étaient de loin moins nombreuses que ses années de punition, puisque sa punition a duré presque la longueur de la vie d’un homme ? Car les péchés ne sont pas jugés d’après leur durée, mais d’après la nature de la transgression. Nous apprenons aussi des Paroles du Seigneur que même si nous avons payé une dure sanction pour nos anciens péchés, mais nous retournons encore à ces mêmes péchés, nous serons punis plus sévèrement qu’avant. En effet, ce n’est que juste. Si un homme ne corrige pas ses voies après sa première punition, il doit être traité plus sévèrement, parce qu’il est insensible au bien et le dédaigne. Mais pourquoi tous ne sont-ils pas punis de cette manière ? Nous voyons que beaucoup de méchants sont en bonne santé, pleins de force et passent leurs journées dans le bonheur. Mais leur manque de souffrance en cette vie deviendra cause d’une punition encore plus grande dans la vie future. Saint Paul l’explique clairement quand il écrit : Mais quand nous sommes jugés par le Seigneur, c’est-à-dire : dans cette vie, nous sommes châtiés, afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde, c’est-à-dire : dans la vie future. (I Cor 11,32) Ce que nous recevons dans cette vie ne sont que des avertissements. Dans la vie future, ce seront de vraies punitions. Alors, toutes les maladies sont-elles les résultats des péchés ? Pas toutes, mais la plupart. Certaines maladies proviennent du péché, comme nous le voyons dans le cas du paralytique et aussi dans celui d’un des rois de Judée, qui souffrait d’une douleur dans ses jambes, comme résultat du péché (III Rois 15,23) ; d’autres maladies sont données en tant que test et épreuve de la vertu, comme dans le cas de Job ; encore d’autres proviennent d’excès de différentes sortes, comme la gourmandise et l’ivrognerie. Certains ont supposé que ses Paroles : ne pèche plus, indiquent que le Seigneur savait que le paralytique Le révélerait aux Juifs après qu’Il l’a rencontré au Temple. Mais ce n’est pas le cas. Il est évident que cet homme était pieux, car l’évangéliste dit : Jésus le trouva dans le Temple. S’il n’avait pas été pieux, il se serait adonné à la détente, au manger et au boire, et aurait couru chez lui pour échapper aux délires et aux interrogations des Juifs. Mais rien ne le dissuada d’aller au Temple. Après avoir reconnu Jésus, regardez avec quelle gratitude il Le proclame aux Juifs. Il ne dit pas les mots que ceux-ci voulaient entendre : «C’est Jésus qui m’a dit de prendre mon lit», mais plutôt : «C’est Jésus qui m’a rendu la santé». Ces paroles reconnaissantes les rendirent furieux, car ils tenaient la transgression du sabbat pour un crime. Si les Juifs ont ensuite persécuté le Seigneur, comment l’homme était-il en faute en Le leur révélant ? Par des motifs sincères, il leur proclama son Guérisseur afin d’en attirer d’autres à croire en Lui. S’ils ont persécuté l’Unique qui faisait le bien, c’est leur propre péché à eux.


Comprenez la Piscine des Brebis comme représentant la Grâce du baptême, dans lequel l’Agneau sacrifié pour nous, le Seigneur Jésus, fut lavé quand Il fut baptisé pour nous. Cette piscine a cinq porches, symbolisant les quatre grandes vertus, plus la divine contemplation des dogmes (mystères), qui sont révélés dans le baptême. La nature humaine, paralysée dans toutes ses facultés spirituelles, était alitée, infirme depuis trente-huit ans. Elle n’était pas solide de sa foi en la sainte Trinité (cf. 3), ni n’avait une foi sûre en le huitième jour (cf. 8), c’est-à-dire la Résurrection générale et le Jugement dernier. C’est pourquoi elle ne put trouver de guérison, car elle n’avait aucun homme pour la mettre dans la piscine. Autrement dit, le Fils de Dieu, qui avait l’intention de guérir par le baptême, ne S’était pas fait homme encore. Mais quand Il Se fut fait homme, Il guérit notre nature et nous ordonna de prendre notre lit, c’est-à-dire lever de terre notre corps, le rendant léger et libre, non alourdi par la chair et les soucis terrestres, et le redressant de sa paresse pour le rendre capable de marcher, ce qui veut dire, d’être actif à faire le bien. L’agitation de l’eau de la piscine laisse entendre le fait de susciter les mauvais esprits cachés dans les eaux du baptême, pour les écraser et les étouffer par la Grâce de l’Esprit saint. Puissions-nous aussi obtenir guérison, car nous sommes paralysés, incapables de faire un pas vers le moindre bien, nous n’avons pas non plus d’homme, c’est-à-dire pas de pensée humaine et rationnelle, qui nous distingue des bêtes irrationnelles, pour nous porter dans la piscine des larmes du repentir, dans laquelle le premier qui y entre est guéri. Celui qui temporise et remet à plus tard son repentir et ne se dépêche pas de se repentir maintenant, n’obtient pas de guérison. Hâtez-vous donc d’être les premiers à entrer dans cette piscine, de crainte que la mort ne vous dépasse. Et il y a un ange qui agite cette piscine de la repentance. Quel est cet ange ? L’Ange du Grand Conseil du Père, le Christ Sauveur (v. Is 9,6). Car, à moins que le Verbe divin ne touche notre cœur et ne l’agite par la pensée des tourments du siècle à venir, cette piscine ne peut pas devenir active et efficace, et il n’y a pas de guérison pour l’âme paralysée. La piscine de la repentance peut aussi être appelée une piscine des brebis : car en elle sont lavés, comme brebis, les parties et pensées intérieures des saints qui sont  préparés pour devenir un sacrifice vivant agréable à Dieu, les rendant innocents et sans malice. Puissions-nous aussi obtenir guérison et nous trouver ensuite dans le saint Temple de Dieu, n’étant plus souillés par des pensées impies, de peur qu’une chose pire, les tourments éternels, ne nous arrive.

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